APRES 30 ANS DE SERVICE : Jonas Sacca retrace son parcours d’instituteur

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APRES 30 ANS DE SERVICE

Jonas Sacca retrace son parcours d’instituteur

Être enseignant, c’est exercer un métier passionnant et exigeant. Celui de participer à la construction de la société en transmettant son savoir et en valorisant les compétences des apprenants. L’enseignant est celui qui forme les cadres de toute une nation, s’adapte au profil de chaque élève pour lui permettre de développer son potentiel en lui transmettant des valeurs de citoyenneté. Ainsi, une attention particulière doit être accordée à ces hommes qui ont fait de ce métier une mission sacerdotale. Pour ce numéro de la rubrique une vie un métier, votre quotidien vous plonge dans l’univers du métier d’instituteur à travers Jonas Sacca, enseignant du primaire à la retraite. Lisez plutôt.

Samiratou ZAKARI

Daabaaru : Pourquoi avez-vous choisi faire carrière dans l’enseignement ?

Jonas Sacca : Il faut dire j’aimais beaucoup les enfants, j’ai toujours aimé la compagnie de ces êtres innocents. Il y avait donc aucun métier qui me correspondait mieux que l’enseignement. Aussi, j’avais la vocation, ce qui m’a permis de rapidement m’initier dans ce secteur.

Parlez-nous de vos débuts dans l’enseignement

J’ai embrassé le métier en 1983. Et j’ai été envoyé pour mon premier poste dans un village de Toucoutounna, dans l’Atacora. Je vous assure que ce n’était pas facile pour moi pour un début de carrière, vu la brousse où j’ai été envoyé. C’était vraiment un calvaire, puisqu’il y avait même pas de tables, ni bancs dans les classes, c’est des monticules qui ont été conçu. Aussi le toit de la salle était défectueux, c’est de la paille qui servait de tôle, les margouillats nous tombaient dessus chaque jour. Et moi même enseignant, je ne pouvais pas dire que j’avais où m’hébergé, ce n’était pas facile. Ce n’était vraiment pas facile, et j’ai voulu même démissionner et rentrer chez moi continuer mes études à l’époque, c’est mon directeur qui pendant des jours a essayé de me faire entendre raison. Et petit à petit j’ai fini mes 2 ans de Jir, puisque en notre temps il fallait faire 2 ans de service patriotique, et c’est après ça je suis allé à l’école normale pour avoir mon diplôme d’instituteur en 1986, avant d’être affecté à Guilmaro dans la commune de Kouandé où j’ai servi pendant huit ans.

Alors dites-nous quels sont les avantages liés à ce métier ?

Les avantages, ils sont énormes. L’enseignement est un métier très noble, et ce qui fait la fierté d’un enseignant après des années de service rendu est de voir les enfants qu’il a encadré devenir des personnes responsables dans le pays. L’enseignant quand il fait bien son travail, il est toujours récompensé partout où il passe. Aussi, avec ce métier là, on a la chance de voyager beaucoup suite aux affectations, on parcourt plusieurs horizons.

Et qu’en est t-il des inconvénients ?

N’est pas enseignant qui veut, mais qui peut et c’est pour cela il est souhaitable d’avoir la vocation avant d’embrasser ce corps de métier. Quand un enfant devient un modèle pour la société c’est grâce à l’enseignant, et aussi quand il devient un cas social. L’enseignant n’a pas de repos, le jour comme la nuit il se bat pour ses apprenants. Il y a la correction des cahiers de devoir et autres après les cours de la journée, on n’a même pas le repos pour nous même. Les risques de maladies aussi sont énormes pour l’enseignant avec la craie qu’il aspire chaque jour, aussi on parle beaucoup dans ce métier. Tous les enfants n’ont pas le même niveau de compréhension, donc on est obligé de beaucoup parler pour se faire entendre. En notre temps comme je l’avais dit au début, les conditions de travail restait à désirer, il y avait pas les moyens. On travaillait avec les moyens de bord, il y avait pas de salles de classes et de matériels de travail. Ce qui ne facilitait pas le travail.

Quel a été le jour le plus heureux de votre carrière ?

Vraiment comme jour heureux, je parlerai du jour où je devais partir à la retraite en 2016. C’était à Bembéréké. Les acteurs éducatifs et les parents d’élèves de la zone ont organisé une grande fête en mon honneur pour me souhaiter une paisible retraite et c’est au cours de cette célébration ils m’ont offert l’ensemble de ce salon que vous voyez là d’environ 1 million de Fcfa comme reconnaissance pour le service que j’ai rendu dans leur localité. C’est un moment qui restera graver dans ma mémoire. Avant ma retraite, ils avaient encore mobilisé des fonds pour m’offrir une moto, c’est vraiment des moments très forts. Cela démontre que l’enseignant quand il fait son métier avec passion, il en jouit même si ce n’est pas dans l’immédiat.

Et qu’en est t-il du jour malheureux ?

Bon comme jour qui m’a marqué négativement c’est surtout le départ brusque vers le père céleste de l’un de mes instituteurs. Cela m’a beaucoup touché, car c’était quelqu’un qui avait l’amour du travail, qui avait une vocation pour ce métier. Et son départ a créé un grand vide dans le cœur de ses élèves, sa famille et moi-même. Je prie toujours Dieu qu’il lui accorde un repos éternel.

Quel est votre appréciation de l’école béninoise aujourd’hui ?

Je dirai que l’enseignement est vraiment en train de se dégrader aujourd’hui. L’enseignement au Bénin n’a plus cette valeur d’antan. Le personnel enseignant aujourd’hui, c’est vrai qu’ils ont le diplôme, mais la conscience professionnelle n’y est plus. On va aujourd’hui dans l’enseignement plus pour chercher de l’argent, il n’y a plus la vocation. Ce qui agit forcément sur la performance des apprenants. Le programme d’enseignement aujourd’hui manque encore d’approche. En notre temps, c’est vrai quand on disait c’est un programme colonial, mais qui était très consistant comparé à aujourd’hui.

Quel est votre message à l’endroit qui ceux veulent suivre vos pas ?

Tout d’abord je leur dirai d’avoir la vocation avant d’entrer dans ce secteur. Et aussi de chercher à beaucoup se cultiver car c’est ce qui révèle même le métier et le rôle de l’enseignant. Les jeunes doivent oublier l’argent et se donner véritablement au travail, et la récompense viendra après à coup sûr.

Votre mot de la fin

Je vous remercie beaucoup pour la chance que vous m’accordiez de m’exprimer et je souhaite plein succès à votre journal.

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Daabaaru