La rencontre entre le président Patrice Talon et son prédécesseur Boni Yayi continue de susciter des réactions surtout au sein des acteurs politiques. A travers une publication postée sur sa page Facebook, le politologue Richard Boni Ouorou s’est prononcé sur la rencontre inédite et historique de ces deux rivaux politiques. Pour Richard Boni Ouorou, cette rencontre est une démarche salutaire qui augure d’un lendemain meilleur pour la décrispation du climat socio-politique. Le béninois vivant au Canada est également revenu sur son opposition au régime de la rupture dont il regrette. A l’en croire, il était prévu une rencontre avec l’actuel locataire de la Marina pour discuter sur certains sujets socio-politiques du Bénin, mais il a tout simplement préféré décliner ces invitations. « Maintenant, je dois faire un aveu. Il était prévu, lors de mon voyage en Afrique, que le Président Talon et moi nous nous rencontrions pour discuter autour d’un repas. J’ai décliné (ces) invitations et, a posteriori, je trouve mon geste inapproprié », a-t-il déclaré, avant d’ajouter, « Cela mérite que je m’en excuse, et je le fais ouvertement ici ».
Lisez ci-dessous l’intégralité de son message.
Daniel KOUAGOU
Terriennes, Terriens,
Chers compatriotes
J’arrive d’un périple au Togo, l’esprit rempli d’espoir et d’optimisme, ayant vécu de plus près un moment que je crois marquant pour l’avenir de notre pays le Bénin.
Je parle bien sûr de la rencontre officielle entre messieurs, Thomas Boni Yayi et Patrice Talon. Il faut leur lever nos chapeaux, car les deux hommes ont ainsi démontré leur volonté de donner priorité à la relance et à la paix sociale.
Pour ma part, Je dois admettre que j’étais déjà depuis quelques semaines dans un état d’esprit positif. Parce que j’ai discuté avec l’actuel Président de la République le 31 juillet dernier, veille du 61e anniversaire de l’indépendance de notre pays.
J’avais alors senti lors de cette discussion, que M Patrice Talon, bien que déterminé, n’en était pas moins un dirigeant responsable, croyant aux mérites de ses réformes, à leur nécessité — elles sont importantes sous de nombreux aspects —, mais aussi qui a réellement à cœur l’unité et la croissance du Bénin.
Et que pour montrer sa bonne foi à ses concitoyens pour la consolidation de cette unité, il était prêt à agir. Il faut reconnaître qu’à cet égard le Président m’était apparu fort différent de l’image que la critique faisait de lui dans les réseaux sociaux.
En parallèle, je poursuivais mes échanges cordiaux et quotidiens comme c’était devenu notre habitude, avec l’ancien président Thomas Boni Yayi, à qui bien sûr je n’ai pas manqué de parler de cet appel reçu du Président Talon et même des conditions qui l’ont entouré et qui sonnaient pour moi comme un geste fort d’ouverture après tout ce que j’ai dit et écrit sur lui. Boni Yayi m’a donc confié être également très préoccupé par la crise béninoise. Et malgré les réticences de certains de ses proches conseillers, il m’a fait part de son désir de travailler, du moins de faire un geste pour que la paix sociale et la relance soient de retour au Bénin.
Les conditions de vie pénibles des jeunes béninois, notamment dans la commune de Tchaourou, l’attristaient profondément, et il m’a dit chercher un moyen de mettre fin à la crise politique par le débat. Lui aussi voyait que cette crise devenait absurde et était un frein au développement et à l’inclusion.
Je me suis donc senti investi de la mission de contribuer à ce qu’un dialogue national soit instauré. Sans que ni Talon ni Yayi ne m’en donnent le mandat, j’ai élaboré l’idée d’un « élan de convergence sociopolitique » au profit du peuple béninois et dont le point de départ serait une rencontre officielle au sommet. Une rencontre Talon – Yayi que je voulais transparente, crédible, honnête, faite selon les règles de l’art. Une rencontre qui serait la première phase d’un processus plus vaste.
Cette première phase s’est produite. Et je dis « Bravo! ».
Maintenant, je dois faire un aveu. Il était prévu, lors de mon voyage en Afrique, que le Président Talon et moi nous nous rencontrions pour discuter autour d’un repas. J’ai décliné (ces)invitations et, a posteriori, je trouve mon geste inapproprié. Cela mérite que je m’en excuse, et je le fais ouvertement ici.
Car, c’était pourtant une chance unique d’exposer au chef de l’État ma vision d’un Bénin démocratique, pluraliste, prospère… Mais je voulais tellement que sa rencontre avec l’ex-président Boni Yayi ait lieu et se fasse sans anicroche; que je ne voulais pas que l’on tire de fausses conclusions de ma présence avant la rencontre des deux à la Marina. Du reste, dans le contexte, je considérais mes idées moins importantes que la paix sociale qui allait être mise de l’avant avec cette rencontre. Bref, j’ai agi sans doute par excès de prudence et par manque de diplomatie.
Or, au-delà de mon mea-culpa, je tiens surtout ici même à féliciter le chef de l’État, Patrice Talon, pour son sens des responsabilités. En recevant Son prédécesseur Thomas Boni Yayi comme il l’a fait et en amorçant du coup une phase de « convergence », c’est un peu, symboliquement, tout le peuple béninois (marginalisé depuis quelque temps) qu’il a reçu et entendu.
Je le remercie de s’être situé ainsi au niveau des intérêts supérieurs du Bénin. Et j’enjoins le peuple béninois, de même que mes lecteurs et tous mes sympathisants, à lui dire également merci.
En agissant de cette façon, le Président mérite que nous lui soyons reconnaissants et que nous soyons justes dans nos analyses et critiques. En empruntant le chemin de la paix sociale et du dialogue — un chemin qui doit mener à la fin des tensions et à la libération des prisonniers d’opinion (Joel Aïvo, Reckya Madougou, Nadine Okoumassou et les autres) —, il peut recevoir notre appui.
Nous verrons comment évolueront les choses, bien sûr, mais pour le moment veillons à transmettre au Président Talon et à Thomas Boni Yayi nos félicitations et nos remerciements. Je compte sur vous, cher.es terrien.ne.s , pour partager cette idée.
Encore une fois, merci, Messieurs Talon et Yayi Boni, d’avoir pris le temps de m’écouter et de vous écouter. Désolé pour mes manquements au protocole!
L’important est que Bénin gagne. Toujours.
Portez-vous bien,
Richard Boni Ouorou
Politologue