CHRONIQUE DES US ET COUTUMES : Les cuillères déchirent les cœurs dans les familles africaines

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CHRONIQUE DES US ET COUTUMES

Les cuillères déchirent les cœurs dans les familles africaines

A chaque société ses coutumes et ses us. Ainsi, dans chaque famille africaine certains traits restent visibles et agissent considérablement sur les liens sociétaux. Ce qui d’ailleurs justifie la légende solidarité notée au sein des familles africaines. En Afrique, la famille est sacrée et s’élargit au quotidien aux neveux, aux cousins et aux amis des cousins. Au-delà des mots, ces liens sont renforcés par le vivre ensemble, ce vivre ensemble qui est agrémenté au quotidien par l’ambiance qui caractérise chaque moment de repas dans les familles africaines.
En effet, l’heure du repas est le moment le plus sacré de la communauté. Ainsi, le repas est le moyen efficace pour solidifier les liens. Car généralement dans les coutumes africaines, la notion de plat n’a jamais existé jusqu’au jour où au nom de la colonisation, les blancs ont tenté de l’inculquer aux petits noirs par le biais de leur école.
Sinon, à l’heure du repas, d’habitude on retrouve petits et grands autour d’une grande calebasse où certains assis à même le sol et d’autres accroupis se servent selon la capacité de leur main quelle que soit la chaleur du mets. Ce sont des moments de joie et de convivialité. Même le passant pouvait s’inviter dans ces festins de tous les jours. Les doigts entrent dans les bouches et ressortent et sont plongés à plusieurs reprises dans la seule et l’unique calebasse. Nul ne craignait la maladie de l’autre, puisque tel que le bonheur est partagé de même le malheur des uns et des autres est partagé à tout moment. Pas de cuillère, pas d’assiette même pas de verre à boire individuel. La boisson est contenue dans une seule calebasse. Toutes les lèvres s’y frottent, alors chacun boit un peu de la salive des autres. Ce qui est un véritable symbole d’amour et de la solidarité.
Mais qu’est-ce qu’on constate aujourd’hui ? Avec les notions occidentales, l’Afrique est en plein dans le ‘’libre ensemble’’. Désormais chaque membre de la famille reste dans son couloir autour d’une même table familiale. Chaque membre de la famille utilise sa cuillère, son assiette et même son verre ou gobelet. Du coup, on est ensemble mais les cœurs éloignés.
La cuillère est venue arracher à chacun les vrais goûts de nos mets. Devant un bon plat de Toubani, de Dembou, de Mantindjan, de Dakouin ou d’igname pilée, on préfère se servir de cuillères. Or, ces repas ont tous leurs goûts lorsqu’ils sont dégustés avec les doigts. Chaque fois que les doigts sont sucés lors d’un repas, le goût est tout à faire particulier.
Certes, il est important de se conformer à la modernité, cependant rester coller à certaines réalités africaines n’est pas aussi mauvais. Comme l’affirme Ousmane Sembène, «  si nous avons opté pour la modernité, cela ne veut pas dire que nous avons renoncé à notre africanité ». Si par crainte de propagation de certaines maladies telles que l’hépatite, la tuberculose et autres on est tenu promouvoir l’individualisme autour des repas, ce n’est pas pour autant qu’il faut abandonner ce qui renforce la solidarité des africains.
Alors, il urge que dans chaque famille, certaines de ces habitudes soient restaurées pour renforcer les liens familiaux. Ainsi, l’accent doit être mis sur le repas en commun surtout lors des retrouvailles. De même, l’utilisation des mains pour manger les repas locaux doit cesser d’être un sujet de honte et de stigmatisation lors des manifestations publiques.
Il est donc temps que les africains puissent s’affirmer par des pratiques qui sont propres à nos sociétés tout en participant à l’idéologie de modernisation et de globalisation car, « le séjour d’un tronc d’arbre dans un cours d’eau, ne le transforme jamais en crocodile », disait Séidou Badian.

 

Edouard ADODE

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