CHRONIQUE DES US ET COUTUMES : L’héritage, plus qu’une épidémie au Bénin

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CHRONIQUE DES US ET COUTUMES

L’héritage, plus qu’une épidémie au Bénin

Le souci de tout parent béninois est d’assurer à sa progéniture un minimum de confort de son vivant comme après son séjour sur la terre. Une ambition aussi noble qui a priori doit participer au développement de la nation puisque bâtir à partir d’un existant, semble toujours mieux que commencer à partir du néant.
Mais, triste est de constater qu’aujourd’hui au Bénin, ceux qui prospèrent réellement sont des enfants qui n’ont hérité de rien de leurs parents. Au même moment, peu de ceux à qui les parents ont laissé de grandes fortunes ont de la peine à tisser la nouvelle corde à l’ancienne. Point besoin d’une démonstration scientifique pour prouver cette situation paradoxale. Il suffit de voir dans les grandes villes du Bénin, dans chaque quartier, il y a toujours de ces anciennes maisons totalement en ruine qui sont en réalité des héritages laissés par de célèbres personnalités. Dans ces maisons où vivent des héritiers, elles sont transformées au quotidien en champs de farouches combats, allant de simples querelles aux altercations entre frères et sœurs faisant de plus en plus recours aux forces occultes pour s’anéantir réciproquement. Par conséquent, autour d’une maison laissée en héritage, se crée une jungle où seuls les plus sauvages arrivent à y rester; quant aux plus faibles, ils sont contraints de tout abandonner au risque de perdre leur vie.

Quand bien même, certains parents prévisibles se refusent d’avoir assez d’enfants afin de les épargner de cette guerre ruineuse, plusieurs de ceux qu’on appelle les héritiers uniques ne jouissent pas pleinement de l’héritage à eux laissé. Ainsi, pour la plupart du temps, peu d’héritiers arrivent à fructifier leurs héritages de manière à en laisser beaucoup plus à leur tour. Dans bien des cas, des héritiers au Bénin sont des personnes passives, auteurs des délires dans les bars et de véritables coureurs de jupon même dans leurs âges de sagesse. In fine, ils se ruinent et sombrent par la suite dans une disette inouïe qui contraste avec leur origine.
Un tour dans les tribunaux du Bénin et le constat est clair. Il n’y a pas de jour où des héritiers ne se retrouvent devant les juridictions pour des affaires qui en réalité ne devraient pas être source de conflits ruineux, mais au contraire source de bonheur et un fonds de départ pour la création de grandes richesses.
Alors, face à ce tableau très sombre que présente l’héritage au Bénin, bon nombre de parents se demandent à quoi bon de laisser autant de problèmes aux enfants. N’est-il pas mieux de finir toutes ses richesses avant de mourir ?

De ma part, cette question ne saurait avoir une réponse affirmative. Ainsi, autant que fait se peut, l’homme doit laisser d’héritage à sa progéniture. Cependant, priorité ne doit pas être donnée à la quantité de biens matériels amassés au profit des enfants, mais plutôt à la qualité de l’éducation donnée à ces derniers. Et parlant d’éducation, il n’est pas question de placer simplement les enfants dans des écoles et universités luxueuses pour prétendre leur avoir assuré une bonne éducation. Mais, il est important d’agir sur leur esprit en leur inculquant de nobles valeurs morales qui renforcent leur côté humain et social faisant d’eux de véritables agents économiques de développement.
Par ailleurs, la nature de l’héritage compte beaucoup pour sa pérennisation. « Quelque grand que soit l’avantage de jouir d’un riche héritage, l’industrie et le savoir-faire valent que des biens acquis», estime Charles Perrault dans son ouvrage Le chat botté. Cela étant, les béninois doivent revoir la nature des héritages qu’on laisse aux enfants. Nos héritages ne doivent pas être uniquement des terres et des maisons.

C’est alors que l’héritage cessera d’être une source de conflits qui rongent des milliers de bras valides au quotidien.
Edouard ADODE

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