CONTRAINT À S’EXPRIMER EN LANGUE DENDI AU VERNISSAGE DES TRÉSORS ROYAUX : Le “Sinaboko” face à un fait discriminatoire . Salifou Daran et Michel Baraga, deux acteurs culturels Baatonu dénoncent

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Le Sinaboko de Nikki Sabi Naïna lll était le samedi 19 février 2022 au palais de la Marina dans le cadre du lancement du vernissage des trésors royaux. Invité par le chef de l’Etat Patrice Talon, l’empereur du Barutem dans la partie septentrionale du Bénin a pu découvrir ces œuvres culturels rentrés au bercail après des décennies passées hors de leur terre natale. À cette occasion, la tête couronnée s’est, aux côtés du chef de l’État, réjouie du retour triomphal de ces trésors royaux qui occupent une place importante dans l’histoire du peuple béninois. Mais contre toute attente, ce gardien de la culture et tradition baatonu s’est fait traduire les propos du président Patrice Talon en langue nationale “Dendi” face à l’absence d’un locuteur baatonu à cette cérémonie d’envergure. Il était également dans l’obligation de s’exprimer dans cette même langue pour qu’un retour soit fait au chef de l’État. Un comportement qui n’est pas du goût de certains promoteurs de la culture baatonu qui dénoncent cet état de choses qu’ils qualifient de discriminatoire.

Salifou Daran et Michel Bio Alou Sabi Baraga, acteurs culturels, pensent qu’il s’agit d’un ‘’complot’’ contre le peuple Baatonu. « L’empereur s’est retrouvé face à ‘’un complot’’ où il était mis devant le fait accompli. Ce qui désole parce que cette situation perdure depuis l’indépendance à ce jour. Lors des évènements politiques et autres organisés par le gouvernement, très souvent c’est le Dendi que les gens prenaient comme langue vernaculaire pour interpréter ce qui se dit au cours de l’évènement », a dénoncé Michel Bio Alou Sabi Baraga. Ils vont plus loin en soulignant que sous le régime du président Boni Yayi, les gens sont allés jusqu’à cibler des villes où habitent des Baatombu, pour enseigner le Dendi qui est une langue importée. Toute chose qui ne permet pas la promotion de cette langue nationale et la valorisation de sa culture qui pourtant, est connue au-delà des frontières nationales. « Voilà encore le président actuel qui interroge le “Sinaboko” qu’il connait baatonu, s’il comprend le Dendi qui n’est pas sa langue. On aurait pu prévoir un locuteur baatonu du moment où on a invité une tête couronnée parlant cette langue. C’est comme si nous les Baatombu, nous sommes ciblés malgré notre poids économique », a fait constater Salifou Daran.

Les deux sages ont également dénoncé la désacralisation de la royauté dans le barutem. Pour eux, le roi est un dieu sur terre, et mérite tout le respect dû à son rang. Il est inconcevable qu’un roi soit déplacé de son palais à tous moments et par n’importe qui souvent pour des intérêts personnels. « Le roi ne se déplace pas n’importe comment, il doit rester dans son palais. Et qui a besoin de lui vient le voir. Pour des évènements, il peut se faire représenter par son Premier ministre ou autre ministre de la cour royale. Il ne lui revient pas de quitter le palais lui-même pour assister à des évènements ci et là. C’est déplorable qu’on assiste à ça », s’est insurgé l’enseignant des lycées et collèges à la retraite Michel Bio Alou Baraga. Il invite de ce fait, l’empereur Sabi Naïna III à prendre exemple de ses collègues des pays de la sous-région comme le Burkina Faso et le Nigéria qui attachent du prix à leur tradition et se font respecter.

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Les deux sages ont, pour finir, invité le gouvernement a également fournir des efforts pour la reconstitution de l’histoire du peuple baatonu comme cela se fait avec ceux du Sud. « Où se trouvent les reliques des rois Bio Guerra et Yarou Séro Kpérigui de Banikoara qui comme Béhanzin, se sont sacrifiés à sang pour empêcher la pénétration des colons ? », se sont-ils interrogés.

Samira ZAKARI

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