Ella Wama Mara, juriste socio-anthropologue
La prostitution est l’échange de service sexuel contre de l’argent ou d’autres formes de compensation matérielle. Elle régule les désirs sexuels des uns et des autres dans la société. Ces deniers temps, ce métier s’est développé sous diverses formes et prend de l’ampleur surtout dans les grandes villes du Bénin. Plusieurs raisons poussent les travailleuses du sexe à se donner à cette activité malsaine. Elle n’est pas sans conséquences néfastes sur la société notamment la jeune génération.
Wilfried AGNINNIN
De plus en plus, le travail de sexe prend une dimension inquiétante au Bénin. Il est plus développé dans les grandes villes du Bénin.
Des facteurs favorisant l’ampleur du phénomène
La juriste socio-anthropologue et activiste pour les droits humains Ella Wama Mara étudie le travail du sexe comme un phénomène multidimensionnel influencé par des dynamiques économiques, sociales, culturelles et de pouvoir. Elle a fait la part des choses entre la prostitution comme forme d’exploitation et comme choix économique. Ainsi, plusieurs facteurs sont à la base de ce phénomène qui prend de l’ampleur jours après jour. La socio-anthropologue Ella Wama Mara a énuméré la faible éducation sexuelle, le manque d’opportunité économique alternative, la précarité, la pauvreté, le taux de chômage élevé, les inégalités sociales, la pression familiale pour subvenir aux besoins et la recherche de statut social à travers l’acquisition de biens matériels. «Le taux d’urbanisation rapide notamment dans les grandes villes comme Parakou. Cela attire de nombreux jeunes des zones rurales qui sont en quête de meilleures conditions de vie. Et donc ces jeunes sont souvent désillusionnés par l’absence d’opportunités et se retrouvent dans des situations de vulnérabilité économique qui les exposent à la prostitution comme une alternative pour gagner leur vie», a-t-elle ajouté. A tout cela, l’on peut évoquer le tourisme sexuel et la mondialisation, l’absence de régulation efficace et de protection sociale ainsi que le rôle des médias et les réseaux sociaux dans l’apologie de la prostitution.
Les actions de la police Républicaine
Pour réguler ce métier, la police Républicaine a interpellé des prostituées et même des responsables de maisons closes à Parakou, Kandi et Cotonou. Cette action de la Police Républicaine, vise à décourager les pratiques jugées dévalorisantes pour la femme pour dire que le racolage et le proxénétisme n’ont pas droit de cité dans la société béninoise. Selon un responsable de la police Républicaine de la ville de Parakou, l’action est menée pour promouvoir les valeurs morales, familiales et éthiques de la société. A l’en croire, c’est aussi une manière de lutter contre la propagation des Maladies Sexuellement Transmissibles (Mst). Il a ajouté que la présence de ces filles de joie dans des ruelles est source d’insécurité, car, des délinquants profitent de leurs présences pour commettre des forfaits. Plus loin, certaines de ces belles de nuit sont en collaboration avec des bandits pour soutirer aux clients de ces dernières, des biens. La source a également souligné que ces lieux sont favorables à la vente et à la consommation des produits psychotropes.
Des conséquence sur la société en l’occurrence la jeune génération
L’émergence de la prostitution dans la société à des répercussions graves sur la jeune génération compromettant ainsi leur avenir et la société. Cette activité fragilise le tissu social et exacerbe les problèmes économiques sanitaires. «Il faut noter comme premier impact, la désintégration des valeurs sociales et familiales surtout dans le contexte sociologique comme le nôtre. L’expansion de la prostitution érode les valeurs traditionnelles et familiales en créant des conflits intergénérationnels. Les jeunes sous l’influence de cette pratique peuvent adopter une vision trop matérialiste de la vie qui relègue les valeurs morales au second plan», croît savoir Ella Wama. Mais ce n’est pas tout. La stigmatisation et la marginalisation des femmes exerçant ce métier ; l’accroissement des inégalités sociales entre l’homme et la femme ; l’alimentation du cycle de pauvreté et de criminalité avec des pratiques illégales comme par exemple le trafic de drogue, le proxénétisme ; la violence, constituent aussi des conséquences non moins négligeables.
Des alternatives
Cependant, des alternatives existent pour les travailleuses de sexe qui ne savent plus où aller. «Ce n’est pas un métier en aucun cas à encourager, il faut le réguler. A défaut de critiquer, il faut créer des solutions. Bien évidemment, sans client, il n’y a pas de prostituée. Donc, et les hommes et les femmes sont concernées par ce phénomène qui interpelle les parents, l’État, les leaders religieux et d’opinion, les acteurs politiques, les autorités à divers niveaux», a-t-elle appelé. Ella Wama Mara propose pour sa part, la mise en place des mécanismes pour étudier les causes profondes de la prostitution, la lutte contre la précarité économique, l’apport d’un soutien de protection sociale aux prostituées en développant des services d’accompagnement pour les personnes qui souhaitent quitter la prostitution et la forte répression contre les réseaux d’exploitation sexuelle. «Il faut aussi une sensibilisation à grande échelle auprès des jeunes pour changer les mentalités et le renforcement les droits des femmes», a-t-elle recommandé pour finir.
