ENTREPRENEURIAT AGRICOLE DES JEUNES AU BÉNIN
La solution à l’insécurité alimentaire et au chômage
Le taux de chômage des jeunes diplômés ne cesse de s’accroître au Bénin. La fonction publique est presque saturée et les recrutements se font de plus en plus rares. Face à cette situation, les gouvernants en collaboration avec les entreprises, organisations, centres d’incubation d’entreprise et autres structures, mettent en place des projets au profit des jeunes pour leur insertion dans l’entrepreneuriat agricole. Une option qui se présente aujourd’hui comme une véritable solution aux problèmes d’emploi des jeunes et de la sécurité alimentaire. Dans ce dossier, jeunes entrepreneurs, directeur de ferme agricole et techniciens de la production animale et végétale donnent les avantages de l’entrepreneuriat agricole tout en proposant des pistes de solutions pour sa promotion.
Wilfried AGNINNIN
Selon une étude de la Commission Economique pour l’Afrique (Cea) intitulée “profil pays 2018”, 72% de la population active est sous-employée. Le taux de chômage quant à lui est de 2,4%. Le Bénin connaît une forte taux de croissance démographique qui accentue la pauvreté d’après cette étude. Pour renverser la tendance, des jeunes se donnent à l’entrepreneuriat agricole.
Mathieu Obognon est un jeune entrepreneur qui s’intéresse à la production animale. Aujourd’hui il est recruté comme étant technicien section Lapinière à la ferme Kdk du maire Charles Toko après sa formation au centre Songhaï de Parakou. Mathieu Obognon s’est lancé dans ce secteur pour défaut de moyens financiers lui permettant de continuer ses études scolaires. «…Comme je n’ai pas les moyens pour poursuivre mes études, je me suis dit que je peux suivre une formation dans le domaine de l’entrepreneuriat agricole pour répondre aux besoins des populations… », a-t-il expliqué. Outre le service que rend Mathieu Obognon à la ferme Kdk, le jeune entrepreneur a, à son actif quelques têtes de bêtes dont il assure l’élevage. Pour lui, l’élevage est rentable et il faut du temps avant d’en bénéficier. « Avant il y avait la production mais il n’y avait pas le marché. Aujourd’hui, si quelqu’un dit qu’il n’y a pas le marché la personne n’a pas cherché….si tu produis tu vas trouver. Je souhaite aux jeunes d’aujourd’hui, après les études s’il n’y a pas les moyens, de ne qu’à s’inscrire dans les lycées ou à un centre de formation agricole », a-t-il invité.
Ouramatou Batchossoum technicienne poussinière, pense qu’avec l’entrepreneuriat agricole l’on est libre financièrement et l’on gère au mieux son temps sans oublier la création de l’emploi à d’autres jeunes. « Si je prends les poules pondeuses on a une double production à savoir la viande et l’œuf. Il y a aussi la disponibilité marché…Si je prends les poulets chairs on a la croissance rapide, à deux mois déjà je peux récupérer mon argent », a-t-elle souligné.
Les difficultés rencontrées par les éleveurs ont souvent traits aux cas de maladies qui attaquent les animaux et parfois le faible taux de productivité. Pour le directeur de la ferme Kdk Séro Kora, la rentabilité dans l’entrepreneuriat agricole est beaucoup moins faible comparativement aux autres secteurs, mais durable et rentable à long terme.
Des projets d’accompagnement
L’insécurité alimentaire dans le pays ; la cherté des denrées alimentaires et produits agricoles ; le manque d’emploi ; le chômage des jeunes et l’augmentation du taux de délinquance juvénile, ont amené les gouvernants à créer des projets d’entreprises en collaboration avec des organisations et institutions. Parmi ces projets, on note le Projet de Promotion de l’Entrepreneuriat Agricole (Ppea) dont l’objectif principal est de veiller à la mise en place d’une vaste pépinière de jeunes entrepreneurs ruraux prêts à s’installer de façon durable dans l’agriculture. Le Projet de Productivité Agricole en Afrique de l’Ouest ( Ppaao), Projet de Promotion de l’Entrepreneuriat Agricole des Jeunes Ruraux du Bénin et le Projet de Promotion de l’Entrepreneuriat pour la Transformation socio-économique des zones rurales au Bénin, sont entre autres programmes qui accompagnent les jeunes dans l’entrepreneuriat agricole.
Outre ces programmes, on dénombre également, des Organisation Non Gouvernementales, des associations de développement des femmes qui s’investissent dans l’entrepreneuriat, des centres d’incubation des jeunes dans les universités et des centres de promotion de l’entrepreneuriat agricole qui offrent des modules de formations aux jeunes.
Nécessité de créer une microfinance dédiée à l’entrepreneuriat
Les jeunes entrepreneurs interrogés sur l’accompagnement de l’entrepreneuriat agricole ont unanimement fait savoir que les dirigeants financent peu l’initiative agricole. Selon eux, les décideurs politiques doivent accompagner davantage et financièrement les jeunes entrepreneurs pour les encourager à mieux faire. Abiba Orou Douarou est une jeune fille engagée à la ferme Kdk spécialité Nutrition et Technologie Alimentaire (Nta), elle parle de son cas. « L’accompagnement des autorités à l’endroit des jeunes qui sortent des lycées n’est pas encore remarquable. Parce qu’il y a des lycéens qui ont fini et manquent de moyens pour pouvoir créer leur propre entreprise…Quant on prend par exemple mon cas, après la formation si j’avais les moyens, un appui j’allais commencer à créer ma propre entreprise. », a-t-elle fait savoir.
Selon le directeur de la ferme animalière et végétale Kigani Dada de Kpéssou (Kdk), « il faut les accompagnateurs, c’est-à-dire le service financier. A l’heure actuelle il n’y pas ce service, une banque qui est adaptée à l’entreprise agricole. Parce que, tu prends un prêt avec un taux d’intérêt assez énorme et on t’exige de commencer le remboursement au moment où même le secteur n’est pas prêt à s’auto suffire pour dégager le bénéfice, ce qui pose déjà un problème ». Il ajoute qu’il faut une formation de base des jeunes dans l’entrepreneuriat agricole et repenser la question de la sécurisation foncière au Bénin.
L’entrepreneuriat agricole se présente aujourd’hui comme une solution primordiale à l’insécurité alimentaire et au chômage des jeunes. Il est impérieux que les dirigeants s’engagent à accompagner davantage les jeunes entrepreneurs agricoles dans leurs ambitions.