RESULTATS CATASTROPHIQUES DES EXAMENS DE FIN D’ANNEE DANS L’ATACORA : Diagnostic d’un mal très profond, mais curable

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Les résultats de l’examen du Certificat d’Etudes Primaires (Cep) session unique de juin 2021, sont tombés depuis le mercredi 30 juin dernier. Tel un croyant fervent, le département de l’Atacora n’a pas trahi sa position. Fidèle à son rang connu très souvent de tous, l’Atacora tient la queue au classement national avec un taux de réussite de 71,73% contre 82,67% sur le plan national. Une réalité amère qui écorne impétueusement l’image de ce vaste département de la partie septentrionale du Bénin. L’Atacora a, depuis la nuit des temps, décroché le palme d’or de la médiocrité en rendement scolaire. Cependant, il est naïf et irresponsable de croire que cette situation est une fatalité. Elle s’explique par plusieurs facteurs et vices développés par les acteurs du système éducatif, des apprenants et leurs parents, qui doivent impérativement prendre la situation avec une sincérité absolue pour arrêter la saignée.

Daniel KOUAGOU

Les résultats peu reluisants qu’enregistre le département de l’Atacora aux différents examens et concours nationaux, n’est pas une fatalité. Bientôt, ce sera la proclamation des résultats du Brevet d’Etudes du Premier Cycle (Bepc) et du Baccalauréat. L’Atacora a une chance extrême de garder la lanterne rouge. Il relève d’un truisme que dans une classe, tous les élèves ne peuvent pas avoir la même moyenne à la fin de l’année. C’est pourquoi il y a un premier de la classe et le dernier. Mais occuper la même place chaque année, cela pose un problème sérieux qui n’est pas dans l’ordre normal des choses. Cela ne peut pas être du hasard. C’est justement le cas du département de l’Atacora qui n’a jamais changé son statut de mauvais élève. Mais plusieurs mobiles pourraient expliquer cet état de chose.

L’alcool, le poison de l’éducation dans l’Atacora

Il n’est plus un secret pour personne, que le département de l’Atacora est l’épicentre du tourisme au Bénin et qui renferme une multitude de cultures à cause de ses habitants à grande civilisation. Ainsi, l’identité du Bénin tire irréfutablement sa source dans cette localité qui, par exemple, produit certains aliments et pratique les activités que l’on ne retrouve nulle part ailleurs. C’est le cas par exemple, de la boisson locale communément appelée « Tchoucoutou » dont le peuple Otammari est le précurseur. Même si certains peuples ont commencé par en produire, personne ne peut le détrôner de sa notoriété. Une boisson adorée et très bien consommée par la communauté du département de l’Atacora et bien d’ailleurs. Ainsi, autrefois réservée aux adultes, la boisson “Tchoucoutou” est consommée maintenant, dans l’Atacora, par tout le monde de tout âge confondu y compris les enfants. Alors, c’est ainsi que les enseignants et apprenants s’habituent à la consommation de boissons alcoolisées.

En effet, la consommation de ce liquide que l’on a suffisamment fait l’éloge d’une boisson naturelle, est un élément indéniable qui empêche les acteurs du système éducatif notamment les apprenants et enseignants, de donner le meilleur d’eux-mêmes. Quoi qu’on dise, cette boisson contient des effets nuisibles et toxiques. A cela s’ajoute, la boisson frelatée “Sodabi” qui connait une promotion ascendante et exponentielle dans ce département. En effet, il n’est pas rare de constater que les jeunes gens organisent des challenges pour détecter celui qui est capable de prendre une grande quantité de cette boisson nuisibles. Dans ces conditions, on ne peut pas espérer de cette couche juvénile une relève de qualité et sincère. Conséquence, c’est les échecs cuisant qu’ils essuient aux différents examens et concours nationaux.

Les travaux champêtres, un élément qui détourne des apprenants de l’excellence
La population des communes de Natitingou, des 2Kp, Tanguiéta, Matéri, Boukombé et Colby, est en grande majorité paysanne. Le champ est leur première activité pécuniaire. Ainsi, les apprenants sont étroitement liés avec les travaux champêtres. Ils abandonnent les cours pour la terre. Mieux, la question de l’instruction peine à prendre l’envol à l’Atacora. Des parents préfèrent envoyer leurs enfants au champ que de les envoyer à l’école. Car, disent-ils, l’école n’est plus prometteuse, elle est une administration qui forme des jeunes gens pour le chômage et donc, paresseux. C’est pourquoi, la plupart d’entre eux éprouvent de volonté à soutenir leurs progénitures dans leurs études. La conséquence directe de ce comportement peu honorable des parents, est que l’on retrouve des apprenants qui se débrouillent eux-mêmes pour payer les fournitures scolaires et la scolarité. Et cette nouvelle responsabilité n’est pas aisée pour eux. Ils n’arrivent pas à étudier véritablement dans les conditions optimales. D’autres par contre, décident carrément d’abandonner les cours pour prendre la tangente de l’exode rural soit au Nigeria ou au Ghana.

Les grossesses non désirées

Si le département garde souvent la lanterne rouge aux examens nationaux, il est souvent réputé champion en matière de grossesses non désirées. En dépit de la scolarisation des filles très faible dans ce département, les quelques-unes qui ont la chance d’aller à l’école, se livrent aux jeux insipides, des activités de jambes en l’air soit avec leurs enseignants ou camarades, soit avec les artisans. Ainsi, les cahiers sont hermétiquement fermés et les jambes ouvertes. A titre illustratif, plus de 147 cas de grossesses non désirées ont été enregistrés au cours du premier semestre de l’année académique 2020-2021, selon les chiffres publiés sur le site du journal ‘’La Nouvelle Tribune’’. Pendant ce temps, les autres départements du pays connaissent des filles qui brillent dans les études.

L’absence des établissements privés recule l’Atacora

L’école publique béninoise est descendue de son piédestal depuis quelques années. Autrefois quartier latin de l’Afrique, l’on est tenté de dire que le Bénin est devenu le quartier de la médiocrité du continent noir. L’on a des enseignants qui s’absentent sans raison valable ou viennent à l’école, et ne font rien que de raconter leur vie aux apprenants et ont cessé d’accroître leurs capacités intellectuelles à travers des formations continues. C’est ainsi qu’on décompte certains enseignants qui ne maîtrisent véritablement pas leurs matières d’enseignement et donc, sans niveau. De l’autre côté, l’Etat n’a pas mis suffisamment tous les moyens nécessaires qu’il faut à la disposition de l’école pour accomplir sa mission, celle de former des cadres pour la relève de demain. Des enfants sans encadreurs ou manque d’infrastructures scolaires, l’on enregistre chaque année.
Alors, la plupart des parents préfèrent envoyer leurs enfants dans les écoles privées où il y a encore un peu du sérieux. Malheureusement, le département de l’Atacora ne dispose pas suffisamment d’établissements privés comparativement aux autres départements qui en ont à floraison. A l’analyse des résultats des examens de chaque année, il se révèle que ce sont les privés qui enregistrent plus de taux de réussite. Donc, ce manque criant des écoles privées dans l’Atacora effrite sa chance d’avoir de meilleurs résultats.

L’absence des enseignants qualifiés, un fait non négligeable

L’Atacora est l’un des départements les moins développés du Bénin. Cela fait que la plupart des enseignants qualifiés sont réticents de rester dans ce milieu. Ils souhaitent plutôt fonctionner dans les grandes villes comme Cotonou, Parakou, Porto-Novo, Bohicon et bien d’autres. Ainsi, l’Atacora regorge peu de professeurs qualifiés dans nombreuses disciplines. Cet état de chose a inévitablement un coup régressant dans les résultats des examens au niveau de ce département.
La responsabilité de l’Etat engagée
Des régimes se succèdent mais l’Atacora bénéficie moins des actions des dirigeants. Des infrastructures, l’eau, l’électricité, la santé, est encore un luxe pour les atacoriens.

Invraisemblablement, le département des grands guerriers des luttes de l’indépendance du Dahomey, le Général Mathieu Kérékou et Kaba, est oublié sur plusieurs plans. Des acteurs du système éducatif ne peuvent donc pas avoir les mêmes rendements que les autres départements qui disposent de ces infrastructures incontournables pour une éducation de qualité. Il va falloir que les gouvernants revoient leur politique de gestion pour un développement équilibré.

Ainsi, les éléments énumérés justifieraient, sans doute, des résultats catastrophiques qu’enregistre le département de l’Atacora. Si tout ceci est revu, le département pourrait faire mieux.

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