RETICENCE DES POPULATIONS BENINOISES FACE AU TESTAMENT
Le meilleur moyen de prévention des conflits de succession ignoré
Les conflits familiaux liés au partage de l’héritage d’un défunt en Afrique sont monnaie courante. Cependant, de manière préventive, le testament, un acte qui contient la dernière volonté d’un individu, se présente comme la mesure pour limiter les dégâts après le décès. Malgré son importance, bon nombre de béninois restent réticents face à l’accomplissement de cet acte de grande valeur à cause de certaines pesanteurs sociologiques qu’il faille briser coute que coute pour une paix profonde dans les familles béninoises après chaque décès.
Athalie GBAGUIDI et Noël SOSSA (Stgs)
Le testament est un acte par lequel une personne exprime ses dernières volontés, notamment pour ce qui concerne la transmission de ses biens après son décès. C’est un acte unilatéral car il est interdit à deux personnes de le rédiger. Il est juridiquement appelé acte de dernière volonté. Le testament préétabli prend effet à partir du moment ou le testateur est inapte ou décédé. Etant un acte légal tous les biens sont enregistrés par l’Etat et les personnes bénéficiaires sont protégées par la loi en cas de conflit. « Nous savons combien de fois les dernières volontés d’une personne sont sacrées dans notre société africaine et d’ailleurs. Après le décès, l’acte est lu, et fixe chaque proche ou parent du défunt sur les biens qui lui ont été légués », reconnait Hyppolite D. Ainsi, plusieurs personnes conçoivent le bien-fondé de la rédaction du testament puisque bon nombre de familles font l’effort de respecter les dernières volontés de leur proche à travers le testament qui reste un acte légal. C’est ce qui pousse certaines personnes à le faire comme le confie sylvain K. « je l’ai fait pour éviter les tensions qui vont survenir après mon rappel à Dieu dans le partage de mes biens. C’est aussi pour protéger ma progéniture contre les profiteurs indésirables. C’est la meilleure façon de me faire entendre lorsque je ne serai plus vivant ». Cet acte permet au testateur de dire la manière dont il désire partager ses biens en tenant compte de chaque héritier.
Les types de testament au Bénin
Selon Françoise Bakpé Tchiakpe, notaire, il existe trois types de testament. Le testament olographe qui est le testament dans lequel la personne rédige elle même en précisant que ça lui appartient, signe à la fin et l’apporte au notaire.
Le testament authentique subdivisé en deux formes : la forme notariée qui se fait chez le notaire en présence de deux témoins. Et la forme judicaire qui se fait devant un juge. Ici, le testateur fait le discours que le notaire transcrit, saisit et lis devant tous afin de vérifier au cas où il y aura d’éventuelles corrections. Puis chacun signe sans oublier de mentionner la date et l’heure.
Le testament mystique. Il est appelé mystique parce que le testateur étant non instruit, analphabète se fait transcrire le testament par un opérateur de saisie, signe et le remet au notaire sous plis-fermé dans une enveloppe. À ce niveau le notaire même ne sait pas ce qui est écrit dans le testament mais il fait l’acte de dépôt en précisant la forme de testament reçu.
Parmi ces types de testament, deux sont souvent remis en cause. Il s’agit du testament mystique car il n’a plus son caractère secret et le testament olographe après lequel un héritier peut refuser l’écriture étant comme celle de son parent défunt ou bien de son proche défunt. Ainsi, ces deux types de testament sont annulables. Par ailleurs, le troisième type fait en présence des témoins ou des notaires ne peut être contesté que lorsque le contestant apporte les preuves de la fraude. D’où c’est un acte authentique.
Condition à remplir par le testateur
Quel que soit le type de testament, il existe des conditions qu’il faut respecter pour être testateur. Alors il faut être au minimum âgé de 21 ans, avoir toutes ses capacités mentales en place. C’est-à-dire être sain d’esprit. De plus, le testateur ne doit avoir aucun lien familial avec les témoins qui doivent être des personnes de très bonne moralité en qui il fait confiance et qui agiront de manière impartiale en son absence. Aussi, le testateur doit veiller à ce que tous ses enfants soient pris en compte. Mais « Il ne peut exubérer un enfant que lorsque cet enfant a eu à porter la main sur lui. On parlera des causes d’indignité dans le code des personnes et de la famille », explique le notaire Françoise Bakpé Tchiakpe.
Le testament peut influencer un couple selon le régime matrimonial pour lequel il a opté. Il serait avantageux au conjoint survivant au cas où ils ont opté pour le régime de la communauté universelle. Mais défavorable pour le survivant dans le régime de la séparation des biens.
Quelques difficultés liées à la mise en pratique du contenu du testament
Il est vrai que les notaires font l’effort d’éviter des situations conflictuelles dans les familles. Néanmoins, on assiste à certains cas particuliers de contestation suite au contenu des testaments. Le problème qui se pose est la loi de la jungle. Autrement dit, la loi du plus fort s’installe quand le testateur laisse des biens très importants aux enfants mineurs. Quant aux enfants majeurs, ils n’ont droit qu’aux parcelles sans avoir au préalable donné les titres de propriété au notaire. Ces derniers confisquent les papiers pour ne pas permettre au notaire de faire la mutation en leur nom.
Dans ce cas il est possible de faire recours au procureur pour prêter main forte à l’exécution du testament afin que les héritiers ne disent rien et se taisent.
A cet effet, il faut que chaque béninois organise sa succession car « le testament ne vient pas interrompre la vie sur terre. Mais plutôt faire vivre pendant qu’on est mort. Ce n’est plus physiquement que vous donnez des ordres mais c’est vos écrits qui continuent de faire valoir votre présence », soutient Sylvain K.
Pour ce faire, toute personne qui aime sa famille, sa progéniture et son époux ou épouse, doit faire le testament afin de garder la paix et l’harmonie dans sa famille.
