La troisième phase du Programme d’Appui au Secteur de la Gouvernance Locale (Asgol 3) a été lancée en octobre 2017, suivie de la première session du Comité d’Orientation et de Suivi (Cos). C’est à cette occasion que le secrétaire exécutif de l’Association pour le Développement des Communes du Borgou (Adécob) a présenté une communication sur la prise en compte des thématiques Santé, Education et état civil dans les actions opérationnelles et à travers les Fonds de Développement Territorial (Fdt) ou Fonds de Développement Local (Fdl). Ce qui a permis la prise en compte desdites thématiques et leur opérationnalisation après un processus. Ainsi trois ans après, le bilan est satisfaisant pour ce qui concerne l’intervention du programme Asgol 3 dans le secteur de l’état civil des communes du Borgou.
Wahabou ISSIFOU
L’état civil, un secteur ressuscité dans le Borgou ? C’est la question que l’on se pose au regard des prouesses réalisées par l’Association pour le Développement des Communes du Borgou (Adécob) grâce à la Coopération Suisse puisqu’avant l’intervention de la troisième phase du Programme d’Appui au Secteur de la Gouvernance Locale (Asgol 3), l’état civil dans les communes du Borgou était à presque au point mort. C’est d’ailleurs ce que justifie Saka Bio Mamadou Yarou secrétaire exécutif de l’Adécob. « Au plan matériel informatique, l’informatisation de l’état civil était à l’état embryonnaire dans les communes du Borgou, les mobiliers de rangement également étaient en nombre insuffisant ou parfois inexistants. Au plan infrastructure, les locaux inappropriés caractérisés par des bureaux mal éclairés et peu aérés, les locaux vétustes et exigus rendant insuffisant l’espace de stockage des archives, le risque de perte des actes du fait de l’accessibilité par tout usager aux archives d’état civil, dû au partage des bureaux état civil avec d’autres services de la mairie. Au plan de l’archivage, le mauvais archivage du fait du mélange des archives générales avec celles de l’état civil, la garde des volets 2 au niveau des communes alors que ces volets sont censés être récupérés par le tribunal et l’insuffisance des armoires de rangement. Au plan ressources humaines, les normes sont respectées pour les chefs services (minimum Bac+3) mais quant aux chefs division et secrétaires d’arrondissement le minimum de Bac n’était pas respecté partout », a-t-il fait savoir. Ces constats ont également été confirmés par le maire de N’Dali Gaston Yorou qui rappelle, « avant l’arrivée de ce programme Asgol 3, nous étions pratiquement aux manuels. C’est-à-dire tout se faisait manuellement, et avec l’avènement de ce projet, la commune de N’dali a évolué sensiblement dans l’établissement et dans la remise des actes d’état civil dans la commune de N’dali ». Oumarou Lafia, maire de Nikki n’en dira pas le contraire en expliquant qu’« avant l’intervention de l’Asgol 3 dans nos communes, il faut dire que les bureaux des états civils de nos communes étaient dans un délabrement total. Lorsque vous vous présentez pour chercher un volet, votre souche, l’équipe qui est là met des jours avant de pouvoir les retrouver. Cela posait le problème d’archivage. Il y avait même certains citoyens qui venaient chercher leur souche mais ils ne la retrouvaient pas, alors qu’ils sont nés effectivement dans la commune. On avait également le problème d’équipement. Pour un grand bureau d’état civil vous aurez peut-être un ou deux ordinateurs. L’autre problème c’est la numérisation des actes d’état civil. La plupart des actes ne sont pas numérisés et cela était un problème. On n’avait pas des bureaux appropriés à l’état civil ».
Mais avec l’intervention du Programme Asgol 3 entre 2017 et 2019, 120.018.935 Fcfa ont été investis. Ce qui a permis la mise en œuvre de plusieurs stratégies par l’Adécob. Ces stratégies sont de deux ordres selon le secrétaire exécutif Saka Bio Mamadou Yarou de l’Association. Il y avait la facilitation à l’appropriation des résultats de l’état des lieux par les Chefs Services Etat Civil (Csec) et l’appui à la priorisation des actions issues du plan d’action proposé suite à l’état des lieux et l’appui aux communes à l’opérationnalisation de la stratégie de réorganisation des services d’état civil. Ainsi à travers ces stratégies, le secteur a été métamorphosé grâce aux Fonds de Développement Territorial (Fdt) investis dans des projets tels que la réhabilitation des locaux au profit des services d’état civil, la construction de bureau d’état civil, l’accompagnement à la modernisation du rayon des archives, l’intervention pour la séparation des archives générales de celles de l’état civil, la numérisation et l’acquisition de gros matériels informatique (photocopieuses, scanners, ordinateurs). Ces fonds ont également permis la mise en œuvre des projets collectifs à savoir la sécurisation des actes qui passe par le cartonnage et la mise en reliure des registres d’état civil, l’appui à la mise en service des centres secondaires d’état civil, la formation des agents de déclaration, la sécurisation des matériels informatiques par la mise à disposition de petits accessoires (régulateurs, onduleurs, disques durs externes, rallonges), l’acquisition des armoires de rangement et l’appui à l’inventaire des actes non retirés dans un souci de les distribuer et de mieux classer le reste. Résultat, à ce jour 4 183 registres sont sécurisés. Les populations aussi en témoignent. « Sincèrement, les choses ont changé dans les mairies. On voit maintenant que la recherche des pièces ne prend plus trop de temps. Vraiment, il y a eu un changement », apprécie Ibrahim Bio Gounou un citoyen de Pèrèrè. Il sera rejoint par Yacoubou Moussa, un autre citoyen de Tchaourou, « ce n’est plus comme avant où pour retrouver une pièce, c’est compliqué. Parfois tu ne retrouve même pas la pièce, pourtant tu es né dans la commune. Mais depuis deux trois ans, la chose est devenu facile, on sait où aller rapidement pour faire des demandes.»
Des difficultés à surmonter
Des prouesses qui ne peuvent donner que de sourire aux différents maires des communes du Borgou qui se confondent en remerciement tout en soulignant les difficultés rencontrées. « Les difficultés ont trait à la passation des marchés publics. Ce n’est pas souvent facile de trouver une entreprise spécialisée dans cette matière. Parfois vous lancez, c’est infructueux et il faut relancer à nouveau. Au niveau du montage des projets, le montage du projet Dao, le Cst n’était pas spécialisé en la matière, ça n’a pas été facile », dixit le maire de Nikki Oumarou Lafia.
L’Adécob également dans la mise en œuvre du programme a rencontré des obstacles. Il y a entre autres, la faible communication et sensibilisation autour de l’état civil. Par rapport aux centres secondaires, il y a le faible niveau des agents de déclaration (la majorité ne sait pas bien écrire et/ou bien parler le français), les fréquentes erreurs sur les feuillets de déclaration, la surcharge de travail chez les agents de santé et par rapport aux actes, il existe une masse importante de personnes sans actes malgré les mesures apportées par le Ravip.
D’autres défis à relever ?
« Grace à la Coopération Suisse nous avons changé un peu l’état de nos services d’état civil et amélioré leur performance. Cependant, d’énormes défis nous attendent encore. On peut les énumérer : Une communication/ sensibilisation autour des déclarations et retrait des actes de l’état civil, poursuivre l’appui au fonctionnement des centres secondaires et la formation des agents de déclaration ; appuyer la communication autour de l’état civil en général et sur le l’importance du retrait des actes de naissance en particulier, poursuivre les sensibilisations sur les déclarations et retraits d’état civil, organiser la recherche et la distribution conjointe des actes de naissance par les Cpc et Csec et Cape, initier la reconstitution des actes dans certaines communes, poursuivre l’appui à la modernisation de l’état civil, améliorer le financement de l’état civil (suivre les effets de l’appui à l’élaboration des budgets et poursuivre le plaidoyer par rapport à l’archivage des volets 2 au Tribunal », a fait savoir le secrétaire exécutif de l’Adécob Saka Bio Mamadou Yarou.
Du côté des maires, ils souhaitent qu’il y ait un fonds affecté spécialement à l’état civil comme ce qui se fait dans les autres secteurs.
Grâce à l’Adécob financièrement soutenue par la Coopération Suisse, l’état civil dans les communs du Borgou a de beaux jours devant lui. A cet effet, il ne reste qu’aux communes de sauvegarder les acquis des réalisations effectuées en la matière et de pérenniser les actions déjà entamées. Tout ceci avec la participation active de la population.