UNE VIE UN METIER : Thomas Oly Koyi parle de sa carrière de vétérinaire « Tout d’abord je dois faire remarquer que tout travail bien fait récompense toujours », constate l’ami des animaux

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UNE VIE UN METIER

Thomas Oly Koyi parle de sa carrière de vétérinaire

« Tout d’abord je dois faire remarquer que tout travail bien fait récompense toujours », constate l’ami des animaux

Parmi les secteurs en plein développement au Bénin figure celui de l’élevage. Il constitue une véritable source de revenus pour tous les acteurs qui interviennent dans ce secteur capital surtout lorsqu’il est bien suivi. Ainsi, tout comme les médecins pour la santé de l’homme, les vétérinaires sont des professionnels spécialisées dans le suivi médical, zootechnique et reproductif des espèces animales surtout domestique en vue d’une bonne croissance de celles-ci. Pour ce numéro de votre rubrique ‘’Une vie un métier’’, Thomas Oly Koyi nous plonge dans l’univers de son métier de vétérinaire qu’il a exercé pendant 30 ans. Lisez plutôt

Pourquoi avoir choisi faire carrière dans le domaine de l’élevage en tant que vétérinaire ?

Thomas Oly Koyi : L’élevage a été pour moi une passion, ce qui m’a amené à faire une formation agricole à l’école Polyvalente d’Ina. Pendant notre formation, à partir de la 3ème année, on devait choisir une branche dans laquelle on doit évoluer et c’est ainsi que j’ai choisi la spécialité Production Animale car c’est ce qui me plaisait en allant dans cette école.

Comment êtes-vous donc devenu vétérinaire ?

Après notre formation on devait aller sur le terrain faire un stage pratique d’un an au près de nos doyens. Après cela on était directement recruté par l’État à l’époque. Nos ordres d’affectations sortaient même souvent avant la fin de notre formation et on devait donc rejoindre nos postes à la fin. Après ma sortie du Cfr d’Ina en 1971, j’ai été envoyé à Natitingou pour mon stage pratique avant de prendre véritablement service à Banikoara en 1972.

Comment étaient vos débuts dans cette fonction ?

Ça été une belle expérience. Nous sommes allés retrouver nos doyens sur le terrain et on a beaucoup appris de ceux-là. On a beaucoup reçu de ceux-ci tant qu’on se montrait vraiment comme des personnes à la quête du savoir et respectueuses. C’était en tout dans une bonne ambiance on a travaillé.

Quels sont les avantages de votre métier ?

Le vétérinaire est appelé à toujours être sur le terrain en brousse avec les éleveurs. Le premier avantage est que quand tu fais bien ton travail tu as facilement la confiance des éleveurs et tu en bénéficie et j’en ai beaucoup bénéficié. Pendant les vaccinations quand les éleveurs sont contents du travail fait, ils réunissent quelques sous qu’ils vous donnent à la fin, puisque la vaccination était gratuite à l’époque. Quand on va sur le terrain on ramène beaucoup de produits des champs, comme le maïs, l’igname, aussi des poulets ou même des ovins comme cadeau des éleveurs. Au niveau de l’inspection, le vétérinaire ne manque jamais de viande à la maison car après l’inspection d’un animal de boucherie, il a droit à un kilo, imaginez donc quand on inspecte 2 ou 3 carcasse dans la journée. Assez davantage quand même.

Qu’en est-il des difficultés ?

Il y en a assez dans ce domaine. Le vétérinaire est toujours avec les animaux qui peuvent donc être un danger pour lui quand il n’est pas prudent. Pendant les campagnes de vaccination on est appelé à vacciner des milliers d’animaux et là on est exposé à des risques comme les animaux qui après avoir cassé la corde de rétention peuvent se déchaîner sur vous et vous causez des dommages physiques. On en a rencontré assez de cas pareils d’ailleurs. Par exemple dans la zone de Malanville les éleveurs n’ont pas pour habitude d’attacher les animaux pour la vaccination, ils sont juste stabilisés dans un parc et l’éleveur se charge de garder les cornes de l’animal pour le vétérinaire qui va envoyer le produit à injecter. Et à ce niveau on reçoit souvent des coups de sabots, de cornes des bêtes. On a également assez de difficultés avec les bouchers au niveau de l’inspection. La vie de toute une communauté repose en quelque sorte dans les mains du vétérinaire car c’est ce dernier qui autorise ou non une viande pour la consommation humaine. Et il est appelé à être très rigoureux et exigeant sur ce point pour ne pas laisser des viandes impropres à la consommation. Il arrive qu’on retire une viande de la consommation après détection d’une maladie infectieuse ou dangereuse comme le charbon bactéridien qui est commune à l’homme et à l’animal. Malheureusement les bouchers n’aiment pas nous comprendre quand on se met sur ce terrain car ces derniers ne pensent pas aux vies qui seront perdues quand une viande du genre passe mais plutôt aux pertes qu’ils vont réaliser. Et on reçoit très souvent de très fortes menaces de ceux là et il faut vraiment être courageux pour exercer aux côtés des bouchers.

Quels ont été donc les moments les plus heureux de votre carrière ?

Tout d’abord je dois faire remarquer que tout travail bien fait récompense toujours. J’ai eu la chance de parcourir la plupart des pays de la sous région comme le Niger, le Burkina et même l’Occident pour me perfectionner dans mon domaine grâce au sérieux que j’ai toujours mis dans mon travail et aujourd’hui je suis fier de ce parcours là. Comme je l’avais dit également plus haut on arrive à gagner la confiance des éleveurs quand ils sont satisfaits de notre travail et quand on est conscient en tant que vétérinaire on fait l’effort de constituer petit à petit un troupeau pour nous même car ces éleveurs nous cèdent à des prix bas les bêtes. Aujourd’hui j’ai une ferme ou j’ai plus d’une centaines de bovins et d’autres espèces également comme les poulets, les ovins. Je fais aussi un peu de l’agriculture. J’ai construit sur ce domaine et j’y vais souvent pour me reposer et m’occuper de mes troupeaux. Ça fait partir des moments positifs de ma carrière.

Contez-nous alors les moments qui vous ont marqué négativement

Comme moment malheureux qui m’a coûté une affectation 5 ans avant mon départ à la retraite c’est surtout cette situation que j’ai vécu à Kouandé où j’ai passé 16 ans de ma carrière. Je suis un agent vétérinaire du Cader et je me suis retrouvé à Kouandé suite à une affectation. 16 ans passé dans cette localité je suis devenu comme un enfant du terroir et je me suis fait des amis. J’avais donc un ami commerçant de bœuf et en même temps exploitant forestier. Un jour mon patron qui était en ce moment lui à Natitingou m’a fait savoir qu’il voulait 30 madriers que je devais lui acheter et garder au secteur où j’étais logé jusqu’au jour il en aura besoin. J’ai donc touché mon ami exploitant forestier au près de qui j’ai pu avoir cela. Les madriers sont au secteur là pendant près d’un an sans que ce patron là ne les réclame et moi même j’avais complètement oublié leur existence. Il a fallu qu’un jour mon ami qui me les avait vendus vienne me voir en me demandant de lui céder les madriers car il avait un client qui en voulait en urgence mais qu’il en avait pas qu’il allait me rembourser les jours à suivre. Je lui ai donc fait confiance en lui livrant les bois qu’il a revendu au double du prix auquel je les ai achetés chez lui donc 10.000 au lieu de 5 000 dans l’espoir d’être remboursé les jours qui vont suivre car je lui ai fait comprendre que ce n’était pas à moi. Mais banalement des mois sont passés sans que mon ami ne respecte son engagement et toute les fois que j’aborde le sujet avec lui il me fait comprendre que je ne devais pas me déranger et qu’il va me revenir bientôt. On en était là quand un jour mon patron a envoyé le chauffeur à Kouandé avec une berne pour ramasser le bois qu’il m’avait commandé. Je ne savais pas quoi faire, j’ai donc couru voir mon ami pour qu’il me règle mais contre toute attente ce dernier m’a ignoré en me faisant savoir qu’il n’avait pas encore de madriers en stock. J’étais obligé d’aller vers un autre exploitant forestier qui était lui même à Kouandé. C’est ce dernier qui a mis à ma disposition les 30 madriers à crédit en attendant que j’aille faire un retrait le lendemain à la banque à Nati pour le régler. Je me suis rapproché par la suite de mon ami pour qu’il me rembourse le bois qu’il me devait et comme toutes mes démarches n’ont abouti à rien je suis allée chez les sages de la localité qui l’ont convoqué pour avoir satisfaction. Mais ce dernier au lieu de chercher à régler la situation l’a mal prise et a cherché à me nuire auprès de mes chefs hiérarchiques parce qu’il avait son neveu directeur de cabinet du ministre. Il est donc allé raconter du faux sur moi comme quoi je ne m’occupais pas du travail qui m’a amené à Kouandé mais je faisais la vente du madrier. J’ai juste reçu seulement un jour en pleine année scolaire une affectation sur Lokossa. J’ai essayé de gérer en tout cas la situation en ma manière et j’ai pu finalement être envoyé à Parakou où j’ai fini ma carrière. C’est une situation qui m’a trop marqué même si ça ne fait pas partie directement de ma carrière.

Quel message avez-vous à l’endroit de la jeunesse d’aujourd’hui ?

Je constate avec regret que les jeunes ne veulent plus travailler mais vise l’argent. Quand on recrute aujourd’hui un jeune il ne pense pas à comment évoluer dans son domaine mais plutôt comment se faire des millions, comment avoir de belles voitures. Je les exhorte donc au travail et le reste viendra après. La jeunesse doit vraiment relever le défi car on constate que le niveau devient bas de jours en jours dans leur rang ce qui n’est pas bien.

Votre mot de la fin ?

Je vous dis merci pour cette occasion que vous m’offrez et plein succès à vous. J’exhorte encore une fois la jeunesse au travail.

Propos recueillis et transcrits par Samira ZAKARI

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