UNIVERS DES PARCHEMINS SCOLAIRES AU BENIN : A quoi sert le diplôme du Cep aujourd’hui ?

5 ans ago | Written by
45 659 vues
0 0

UNIVERS DES PARCHEMINS SCOLAIRES AU BENIN

A quoi sert le diplôme du Cep aujourd’hui ?

Le marché de l’emploi est de plus en plus exigeant sur la compétence, l’expérience et le niveau d’étude des demandeurs. Au regard de cette évolution, le Certificat d’Étude Primaire (Cep) est très peu demandé dans les administrations, les concours et même lors des opportunités d’emploi au Bénin. Néanmoins, son caractère de diplôme de base garde toujours son sens. Faut-il supprimer ou donner une nouvelle orientation à ce diplôme ? Cette question suscite assez de polémiques et mérite plus de réflexion pour l’avenir de ce diplôme.

Wilfried AGNINNIN

Autrefois appelé Certificat de Fin d’Etudes Primaires (Cefep) et même populairement appelé “ le certif ” le Certificat d’Etudes Primaires (Cep), est un diplôme aussi vieux que l’école républicaine française. Il couronnait la fin des études primaires. Se présentaient à cet examen, les élèves des classes de fin d’études âgés de 12 à 14 ans. Ceux qui n’avaient pas encore 12 ans devaient obtenir au préalable une dispense d’âge d’une année de l’inspecteur d’académie. Le Cep est supprimé en France en 1989. Néanmoins il existait un Cep pour adultes.
Au Bénin et dans les territoires coloniaux, ce diplôme a suivi la création de l’école publique et le premier examen avait eu lieu probablement vers 1910, selon une recherche de l’inspecteur de l’enseignement à la retraite Michel-Robert Gomez, et publiée sur le site Overblog. Autrefois, le diplôme du Cep marque la fin des études primaires et constitue dans le même temps l’ouverture vers l’enseignement secondaire. En juin 1976, il va subir des modifications et prend le nom de Contrôle des Etudes de Fin de l’Enseignement de base (Cefeb). Mais avec le temps et au fil des années, le Cefeb a subi des réformes au Bénin et est redevenu le Cep jusqu’à aujourd’hui.

Cep, un diplôme très peu demandé

Le Certificat d’Etudes Primaires (Cep), est très peu demandé aujourd’hui sur le marché de l’emploi. Cet état de chose s’explique par la maîtrise insuffisante de la langue française qui constitue par ailleurs un obstacle sérieux à la compréhension des textes des sujets proposés à l’examen et à la formulation correcte et juste des pensées des détenteurs de ce premier diplôme scolaire. Pour Moussa Ankidosso technicien à l’Office de Radio et Télévision du Bénin (Ortb) à la retraite, le diplôme du Certificat d’étude Primaire (Cep) n’est plus aujourd’hui valable dans plusieurs domaines. « Même pour être un chauffeur d’abord, un conducteur de véhicule, quand on vous demande le diplôme et que vous présentez le Cep on vous dit non, on vous rejette », a-t-il démontré.
En plus, aujourd’hui il est constaté que les candidats au Certificat d’Étude Primaire (Cep) manquent de maturité avant d’aller à l’assaut de cet examen à cause de leur très jeune âge. En témoigne l’âge de la plupart des candidats qui s’oscille entre 8 et 12 ans. Cette tranche qui était autrefois l’âge de début de scolarisation. Aussi, la demande est forte que l’offre et le terrain est plus exigeant sur certains critères d’éligibilités. Ce qui fait dire à Moussa Ankidosso, « Si vous voulez chercher du travail aujourd’hui avec ce diplôme au Bénin ça serait difficile pour vous ».

La valeur du Cep, d’hier à aujourd’hui

Pour Brahima Aboubacari président de l’Association des Parents d’Élèves (Ape) de l’École Primaire Publique (Epp) Abdoulaye Issa de Parakou, le Cep est un diplôme de base. « Pourquoi on va supprimer le Cep. C’est un diplôme qui te permet d’avoir le B-a Ba au cours primaire. Dans certains concours on demande d’abord le Cep avant qu’on ne t’accepte », a-t-il justifié. Selon Ankidosso Moussa les personnes qui ont le Cep sont considérées ailleurs. Il l’en croire, c’est le premier diplôme. « Nous, en notre temps, si tu as le Cep c’est comme quelqu’un qui a le Bac aujourd’hui. Parce qu’on t’appelle et on te nomme à la tête d’une administration. La plupart des anciens hauts cadres et même actuellement que vous voyez, ont commencé par le Cep », a-t-il rappelé. Il a démontré que les détenteurs du Cep auparavant avaient plus de chance sur le marché de l’emploi. « Nous, on a travaillé avec le diplôme du Cep jusqu’à aller en retraite », conclut-il.
Pour Abdoulaye Ibrahima directeur de l’Epp Abdoulaye Issa de Parakou, le diplôme du Cep est nécessaire pour toute personne. A travers ce diplôme, les apprenants sont évalués du Cours d’Initiation (Ci) jusqu’au Cours Moyen 2e année (Cm2). « C’est après l’évaluation qu’on peut savoir si l’élève est susceptible de faire le secondaire. C’est donc normal qu’après 6 ans, qu’on évalue les enfants pour voir ce qu’ils ont retenu », a clarifié le directeur. Le Cep c’est un diplôme qui peut motiver l’enfant à aller de l’avant.
Roger Assouma parent d’élève quant à lui pense que les personnes ayant le Cep ont très peu de chance et sont d’ailleurs mal vues lors des concours. « Moi, si mon enfant passe une à deux fois le Bepc et que ça ne marche pas, je le mets en apprentissage pour suivre un métier. Parce qu’aujourd’hui pour trouver de l’emploi avec le Bac c’est difficile et c’est là qu’on va parler du Cep », a expliqué le parent d’élève. Pour sa part, Ankidosso Moussa a fait savoir que les personnes détenteurs du Certificat d’Étude Primaire (Cep) uniquement sont souvent rejetées dans la société. « Même si tu déposes ton dossier aujourd’hui dans une administration pour dire que tu cherches de l’emploi avec le Cep, si on voit déjà que c’est le Cep que tu as présenté, on n’étudie même plus le dossier », a-t-il ajouté.

Des perspectives

Selon le technicien à la retraite de l’Ortb, il faut réconcilier le Cep à d’autres métiers manuels pour qu’il soit véritablement valable et considéré. « En notre temps, quand vous passez déjà au Cm2, lorsque vous allez au Cep une, deux fois et que ça ne marche pas, il y a une école technique à côté. Il s’agit de la maçonnerie, la mécanique, la menuiserie et autres en tout cas vous n’allez pas quitter zéro. Maintenant il n’y a plus ça », a fait savoir Ankidosso Moussa.
Selon Abdoulaye Ibrahima directeur de l’Epp Abdoulaye Issa de Parakou, il faut repenser à une autre politique d’orientation de l’éducation maternelle et primaire pour l’adapter aux réalités actuelles. « Les colonisateurs quand ils étaient arrivés, leurs problème n’étaient pas de former des citoyens qu’ils peuvent se suffire, se gérer, mais ils avaient besoin des citoyens pour les aider à intégrer le milieu. Donc avec le Cep, tu peux lui servir d’interprète, lui servir de garçon de courses », a rappelé le directeur. Au regard de ces besoins les demandeurs d’emploi étaient exigés en son temps. Cependant, on peut améliorer selon lui, le nouveau programme pour relever le niveau des apprenants.
A la question de savoir s’il faut supprimer le Cep, Michel-Robert Gomez propose, « il faut mettre fin à cet examen, le plus tôt sera le mieux. Cependant, étant donné que toute innovation précipitée risque d’être préjudiciable à la vie sociale, comme les habitudes prises résistent à être déracinées et que les Béninois ont pris un certain goût à apprécier l’obtention de diplômes, il faut se donner le temps nécessaire (3- 5 ans ) pour informer les populations, pour préparer psychologiquement les familles à accepter le fait et pour mettre en place les mesures de régulation nécessaires avant que la décision ne soit prise ».
Cette décision, selon les analyses de l’inspecteur, permettra d’économiser les millions de francs cfa annuellement engloutis dans l’organisation d’un contrôle qui ne sert finalement à rien. A en croire l’inspecteur, cette mesure fournira aux enseignants et aux élèves l’occasion d’orienter leurs efforts vers d’autres préoccupations de véritable culture, en faisant une meilleure utilisation du temps scolaire. « On pourra, en conséquence, remplacer le Cep par un véritable Cefeb (Certificat ou Contrôle de fin d’éducation de base) en français ou en langues nationales que passeront logiquement les élèves qui ne seraient pas autorisés, après la classe de troisième, à continuer leurs études ou pour des adultes qui en auraient besoin », préconise Michel-Robert Gomez.

Quotidien Daabaaru, leader de la presse écrite dans le septentrion

Article Categories:
A la une

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Daabaaru