VOYAGE DANS LA DIVERSITÉ DE LA CULTURE BAATONU : À la découverte des “Kinnu Gbinnon bu”, le clan pour lequel le “vol” est une tradition à pérenniser

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La culture est la carte d’identité d’un peuple, l’un des paramètres qui permet de distinguer les sociétés. Ainsi, chez les “Kinnu Gbinnon bu“ un clan rencontré au Nord du Bénin précisément chez les Baatombu, le ‘’vol’’ est une tradition jalousement conservée depuis des générations. Face à l’ampleur de la modernité dans la société, les “Kinnu Gbinnon bu“ se battent pour garder allumé le flambeau de leur identité afin de donner un sens à la célèbre phrase, « un peuple sans culture est un arbre sans racines ».

Samira ZAKARI

« Chez nous, le vol est un devoir. Un vrai “Kinnu Gbinnon”, doit voler ». Ce témoignage de Baké Manga, enseignante à Parakou dit tout sur la réalité de l’identité de ce clan des Baatombu au Nord du Bénin.

En effet, si pour certains, soutirer un objet qui ne vous appartient pas est considéré comme du vol et punissable, il est cependant signe de la bonne marche de la culture chez les “Kinnu Gbinnon bu”.

Et c’est d’ailleurs au nom de cette culture que le dimanche 30 octobre 2022, un groupe de jeunes gens de ce clan a envahi le marché Guèma dans le troisième arrondissement de Parakou, où des marchandises ont été volées sous le regard impuissant des propriétaires. « Qu’est ce qu’on pouvait y faire ? C’est la tradition, ceux qui ne connaissaient rien de cela, se révoltaient mais on essayait de les calmer », a laissé entendre Idayatou Mama, vendeuse de divers au marché Guèma.

Sens d’une tradition atypique

Selon Gobi Worou Kinnu, membre du clan des “Kinnu Gbinnon bu” interviewé par Deeman Tv, la tradition réside dans le fait que les membres de ce clan soutirent eux-mêmes des objets sans le consentement des propriétaires. « C’est le fait de soutirer là on qualifie de vol. Si c’est au marché et la personne refuse qu’on emporte, sa marchandise est maudite sans même qu’on ouvre la bouche pour le dire. Cela crée des problèmes à l’avenir pour le propriétaire. On ne nous donne pas, on prend nous même. Si tu nous vois venir et tu prends pour nous donner, on ne prend pas », a-t-il expliqué.

La sortie des “Kinnu Gbinnon bu”, dans un endroit public pour ‘’voler’’ marque un évènement spécial pour les membres de ce clan. « Si vous les voyez comme ça, soit ils ont une naissance, un mariage ou autre. Par exemple quand quelqu’un accouche chez eux, les premiers vêtements et vivres du nouveau né et de la maman doivent être volés. C’est la tradition, c’est ce qu’on est venu trouver ça », a expliqué Worou Wonka Yankpe, un sage du quartier Dokparou. Pour Gobi Worou Kinnou, la pratique sans entrave de ce rituel est source de bénédictions pour les personnes dont les objets sont pris, quand celles-ci se laissent faire.

Le rude combat de survie de la tradition sous l’effet de la modernité

À en croire Worou Wonka Yankpe, ce pan de la tradition du clan “Kinnu Gbinnon” est en voie de disparition face à l’ampleur que prend la modernité dans les sociétés. « Peu sont aujourd’hui les jeunes de ce clan qui savent que voler est leur identité. Quand tu vas leur parler, ils te diront que c’est la vieillesse qui te dérange. D’autres le savent mais ne le pratiquent pas parce qu’ils sont influencés par la modernité », déplore-t-il. Son constat est d’ailleurs confirmé par Nawal Djibril, étudiante à Parakou qui confie n’avoir jamais entendu parler de cette tradition. « Je sais que je suis “Kinnu Gbinnon”. Mais ce côté où on dit qu’on vole là, moi je n’ai jamais entendu parler de ça, les parents n’en ont jamais parlé », rassure-t-elle, très fière quand même d’appartenir à ce clan très particulier.

Consciente qu’aucun peuple ne se développe en laissant de côté sa culture, cette jeune étudiante fière de ses origines invite les jeunes comme elle, à un retour aux sources car dit-elle, « la modernité ne doit pas nous empêcher d’être qui nous sommes réellement ».

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