Communément appelée « Sonrou » en langue Baatonum, la moutarde est incontestablement le secret des bonnes sauces dans la partie septentrionale du Bénin. Produite à base des noix de néré et présentée sous forme granulée, la moutarde « Sonrou » est un ingrédient très prisé au Bénin notamment au Nord-Bénin. Cependant, depuis un certain temps, les boules de moutarde ont perdu leur poids habituel. Une situation qui est due à la hausse du prix de la matière première devenue de plus en plus rare. Une descente dans des marchés de la ville de Parakou par une équipe de la rédaction, a permis de faire le constat.
Wassihou GUEGUI MASSIA (Stg)
Au nord du Bénin, impossible de préparer une sauce typique de la région, sans y ajouter du « Sonrou », qui fait partie des ingrédients phares en cuisine. On retrouve cette moutarde dans la cuisson des sauces comme les feuilles de gombo (kobsa), les feuilles de baobab, le gombo sec, les légumes ou même la sauce tomate comme le confirme Barikissou S. ménagère à Parakou. «Le Sonrou c’est la base. Vraiment moi je ne peux pas faire de sauce sans y ajouter de la moutarde Sonrou. Même dans le riz, je mets la moutarde», a-t-elle confié
En effet, la moutarde est obtenue à partir de la transformation des noix de néré, un arbre retrouvé au nord du Bénin. Après préparation, la moutarde se présente sous deux formes. La forme granulée qui est la plus courante et la forme moulue qui se reconnaît par sa forme noirâtre. Mais cet ingrédient fortement consommé au niveau local fait depuis quelques temps, face à une cherté. En témoigne la taille de la boule de 25 f qui diminue chaque jour.

Quelques vendeuses du « Sonrou » au marché
De la cherté de la moutarde « Sonrou »
Dama Orou Gnanmé, vendeuse de moutarde au marché Dépôt de Parakou a donné les raisons qui expliquent cette hausse de prix et la diminution de la quantité de ce condiment précieux. Selon ses propos, la matière première (néré) est devenue chère et rare. Ainsi, la bassine du néré est passée de neuf mille francs à trente cinq mille francs actuellement. De même, «après l’achat du néré qui a augmenté de prix, nous achetons aussi du Bourbourg pour piler les graines afin d’éviter du sable dans la moutarde», a-t-elle ajouté. Bariki Kaboura, vendeuse de la moutarde revient aussi sur la cherté du néré. Une hausse de prix qui, à l’en croire, serait l’abattage de l’arbre du néré pour d’autres fins notamment la production du charbon ou encore dans le cadre des travaux champêtres.
Les consommateurs se plaignent
Dans le rang des consommateurs, c’est la désolation car ceux-ci doivent débourser plus que d’habitude pour acheter la moutarde. C’est le cas de Brigitte Kombeto, consommatrice de la moutarde à Parakou qui déplore la diminution de la boule de moutarde au marché. «C’est très cher maintenant. Il faut augmenter le prix d’achat, sinon la quantité est insuffisante pour la cuisson. Avant, tu pouvais prendre pour 100 francs et faire une bonne sauce. Mais maintenant, il faut pour 250 pour avoir la même quantité de sauce», a-t-elle laissé entendre. Brigitte Kombeto, a par ailleurs, reconnu que la moutarde est d’une consommation locale et purement africaine. Dans ses dires, elle remplace parfois la tomate pour donner une saveur plus spéciale à la cuisson et contient plusieurs substances nutritives qui aident à maintenir une santé robuste.
Certes connu sous le nom de « Sonrou » au Nord du Bénin, la moutarde de néré est cependant, consommée au-delà de cette région, notamment au Sud où elle est appelée Afitin. Il urge que les autorités prennent des mesures nécessaires pour sauver la moutarde en protégeant le Néré en voie de disparition sous le coup des activités humaines.