À Banikoara, dans le département de l'Alibori, une jeune fille de 14 ans, survivante de mariage forcé, a fait un émouvant témoignage sur sa situation. À l'époque, la survivante, résidente à Bouanrou, un village de l'arrondissement de Gomparou dans la commune de Banikoara, n'avait que 14 ans lorsque son oncle a voulu la marier de force. Malgré le refus de sa mère, elle a été contrainte à un mariage forcé. Grâce au dynamisme et à l'intervention du chef de son village, elle a finalement pu retrouver sa famille avec joie et a été inscrite dans un centre d'apprentissage de couture. Découvrez à travers cette interview exclusive réalisée le 21 décembre 2024 , celle qu'on a surnommée Déborah. C'était au Guichet Unique de Protection Sociale (Gups) de Banikoara.
Wilfried AGNINNIN
Journaliste : Bonjour Déborah
Déborah : Bonjour Monsieur
On voudrait que tu nous racontes un peu l'histoire du mariage pour lequel on t'a sauvée
C'est le frère de notre papa qui voulait me forcer à me marier, mais notre maman a refusé. Quand notre maman a refusé, le frère de notre papa a dit qu'il voulait absolument me marier. Et ma maman est partie voir son frère. Quand ma maman est partie le voir, son frère est venu au CPS (Centre de Promotion Sociale). Quand il est venu au CPS, ils ont raconté ce qui s'était passé. Puis, avec le chef, ils sont venus dans notre village (Bouanrou). Après cela, le gars m'a pris pour m'amener chez lui. Quand ils étaient en train de me chercher, ils ont envoyé des convocations plus de quatre fois, mais il n'est pas venu. À la cinquième fois, c'est le chef qui l'a envoyé. C'est après cela que le gars m'a ramenée chez moi. Quand il m'a amenée chez moi, le chef du village m'a demandé si je voulais continuer l'école ou si je voulais apprendre un métier. Je lui ai dit que je voulais apprendre. Quand je lui ai dit que je voulais apprendre, il m'a dit qu'il y avait un tailleur qui cousait des habits dans les parages. Quand il m'a dit que c'était au GUPS de Banikoara (ex-CPS) que j'allais apprendre, j'avais même refusé. J'avais commencé à pleurer parce que je n'avais pas l'habitude de rester ici. Et quand j'étais en train de pleurer, il m'a prise comme son enfant, sa propre fille. Tout ce dont j'avais besoin, il le faisait pour moi. Après cela, il m'a aidée à payer 80 000 francs pour le contrat.
Déborah, victime de Mariage Forcé
Aujourd'hui, tu as quel âge ?
Aujourd'hui, j'ai 17 ans.
Au moment où les choses se sont passées, tu avais quel âge ?
J'avais 14 ans
Et comment te sens-tu aujourd'hui, le fait de te retrouver en apprentissage ?
Je me sens à l'aise, je suis fière d'avoir un métier pour construire mon avenir
Est-ce que tu peux sensibiliser les autres filles qui sont dans le même cas que toi ?
Oui, je peux le faire.
Le mariage d'enfants, pour toi, c'est une bonne chose ou une mauvaise chose ?
C'est une mauvaise chose
Pourquoi ?
Parce que si tu n'as pas l'âge et qu'on te marie, tu vas souffrir, maigrir et tu seras encore sale.
Qu'est-ce que tu as envie de dire aux autres filles qui veulent se marier tôt ?
Je vais leur dire qu'elles n'ont qu'à attendre d'abord d'avoir au moins 18 ans avant de se marier. Et puis, qu'elles apprennent un métier, même si c'est après, elles pourront faire quelque chose avec. Parce que souvent, quand tu te maries et que tu ne fais rien, dans le foyer, tu vas souffrir. Tous les jours, tu vas demander de l'argent à ton mari, et il sera fatigué de toi. Il ira même chercher une autre femme dehors, celle qui fait quelque chose.
Déborah, victime de Mariage Forcé
Déborah, qu'est-ce que tu as envie de dire aux parents qui forcent leurs filles à se marier ?
Il y a des parents qui, parce qu'ils sont pauvres, forcent leurs enfants à se marier. Il y a aussi des filles qui veulent, mais après, elles démissionnent. Je demande aux parents d'éviter les mariages forcés, car ce n'est pas une bonne chose.
Avant que tu ne te retrouves ici, plusieurs partenaires ont soutenu ton apprentissage. Qu'est-ce que tu veux leur dire, en guise de remerciement ?
Je vais les remercier abondamment. Que Dieu bénisse leur travail. Et je souhaite qu'ils aident aussi ceux qui sont dans le besoin, comme ils l'ont fait avec moi.



