En Afrique, pour empêcher ou déclencher la pluie, les traditionalistes font recours au savoir-faire endogènes. Au Bénin, cette pratique ancienne est toujours d’actualité surtout pendant la saison pluvieuse. Cependant, son rôle d’antan celui de valoriser la tradition à travers des démonstrations ancestrales lors des événements culturels, semble être relégué au second rang. Ainsi, des garants de la tradition utilisent ce pouvoir à d’autres fins. De même, ces techniques agissent négativement sur le climat favorisant ainsi les phénomènes du changement climatique. Quelle utilisation font aujourd’hui, les garants de la tradition de cette « météo locale » ?
Barnabas OROU KOUMAN
C’est une pratique qui est aujourd’hui utilisée à d’autres fins avec un objectif bien précis. Une démonstration de puissance chez certains détenteurs de la tradition, détournée de sens spirituel.
Selon le prêtre de Fâ et spiritualiste, docteur Juste Danhouégnon, c’est la divinité tonnerre qui contrôle la pluie. « Il y a des feuilles aujourd’hui, lorsque vous les rassembler avec certains ingrédients, vous faites de la fumée et cette fumée va dans les cieux, c’est un message que vous lancer vers des divinités. La divinité tonnerre reçoit ce message et vous apporte la pluie. Dans le même temps, il y a d’autres composés qui sont anti appel pluie, si je peux m’exprime ainsi, et lorsque vous rassembler ces ingrédients, vous envoyez le message, c’est pour dire au dieu tonnerre, s’il te plaît, calme-toi, n’envoie pas la pluie, pendant tel nombre de jours. On arrive même jusqu’à préciser le nombre de jours, on arrive même à orienter cette pluie ailleurs », a-t-il expliqué.
Pour le docteur Hermione Zounon Mama spécialiste en sciences agro-économiques, ces pouvoirs ancestraux étaient souvent démontrés lors des festivals. «…Je peux vous certifier qu’il existe bel et bien, celles qui sont pratiquées avec succès dans nos milieux, on rencontre des clans initiés à de telles pratiques, et qui le font souvent en ce qui concerne le refoulement de la pluie. Au temps jadis, ce sont des savoirs qui sont démontrés au cours des festivals annuels, de démonstration de puissance. C’est-à-dire, si un clan provoque la pluie, un autre peut décider de l’arrêter et fait jaillir des grondements de tonnerre surplace ou un soleil de plomb », a-t-elle fait savoir dans une interview accordée à Fraternité Fm de Parakou. Le prête de Fâ et spiritualiste, Dr Juste Danhouégnon, ne dira pas également le contraire, lorsqu’il affirme que, les garants de la tradition font recours à cette pratique, lors des grandes cérémonies.
Des conséquences naturelles et climatiques
Selon le spiritualiste, « lorsque cette pratique sera répétitive, c’est là que vous pouvez fâcher le dieu de tonnerre et qui peut agir en fonction de sa colère ». Au docteur Hermione Zounon Mama d’ajouter, « vous savez quoi, aujourd’hui ces savoirs existent. Puisse qu’il n’y a plus de festival, ils sont utilisés à d’autres fins surtout pour se régler certains compte entre familles, entre clans, entre villages, entre quartiers dans nos milieux ruraux », se désole-t-elle.
De son côté, la spécialiste en sciences agro-économiques, a fait remarquer, les pouvoirs ancestraux utilisés pour maîtriser la pluie, constituent des mystères qui rendent difficile la recherche scientifique sur le climat. « Dans nos milieux, nos détenteurs de savoir endogène, possèdent leurs techniques et pratiques de déclanchement, de refoulement de la pluie. Les méthodes pour empêcher des pluies tout comme celles de leur déclanchement regorgent des mystères qui rendent un peu difficile leurs analyses scientifiques », a-t-elle fait savoir. A en croire le prête de Fâ, cette pratique agit sur les prévisions climatiques, car, les pluies sont déprogrammées et deviennent irrégulière dans les localités concernées. « Les implications naturelles, c’est lorsqu’il est prévu dans un mois, dans une région donnée, selon le climat, qu’il y aura trois fois pluies dans ce mois, lorsque cette pratique est faite, la pluie est bloquée », a-t-il précisé.
En clair, les garants de la tradition et les scientifiques, doivent se donner la main pour mieux faire face aux affres des changements climatiques. Ainsi, les savoirs endogènes auront contribué à la gestion efficace et efficiente du climat au Bénin.