Du 7 au 10 juin 2024, le ministère béninois de la santé a lancé une vaste campagne de vaccination contre la poliomyélite chez les enfants, sur toute l’étendue du territoire national. Et qui dit réussite de la campagne de vaccination, dit grande mobilisation communautaire. C’est à cette tâche que la radio communautaire Tchaourou Fm s’est faite démarquée en s’investissant activement dans la sensibilisation et la mobilisation des communautés dans sa zone. L’engagement dont fait montre cette jeune radio née en 2021, est expliqué par le Directeur Polycarpe Hounsou. Voici son interview avec Hippolyte Djiwan, Chargé de la Communication à Unicef Bénin.
La Rédaction
Hippolyte Djiwan: Le ministère de la Santé a organisé du 7 au 10 juin 2024 la deuxième édition de la campagne de vaccination contre la poliomyélite. Comment votre radio participe-t-elle à cette campagne ?
Polycarpe Hounsou: Notre radio participe activement à la campagne en apportant sa touche en ce qui concerne la sensibilisation des populations en vue d’une adhésion massive, avec pour objectif un taux de vaccination dépassant les 100%. Cela se matérialise par nos différentes productions radiophoniques notamment les microprogrammes, la diffusion de communiqués émanant de la Direction Départementale de la Santé du Borgou annonçant la campagne, la couverture médiatique des activités en lien avec la campagne, la réalisation d’interviews, ainsi que la production, la diffusion et la rediffusion d’émissions de sensibilisation. Ces différentes productions sont réalisées aussi bien en français qu’en langues nationales, telles que Bariba, Peulh et Nagot. Une large diffusion en a été assurée dépassant même la quantité prévue dans le contrat que nous avons signé avec la Direction Départementale de la Santé du département du Borgou. En tant que radio communautaire, nous estimons qu’au-delà de tout intérêt financier, il est important d’apporter notre contribution.»
Comment faites – vous pour amener les parents à faire vacciner les enfants qui sont concernés ?
Le seul mécanisme dont nous disposons, ce sont nos micros. À travers nos productions, nous les sensibilisons sur le bien-fondé de la campagne, l’importance de recevoir les agents vaccinateurs et surtout de laisser les enfants recevoir les gouttes de vaccin. Ces productions mettent l’accent sur la maladie qu’est la poliomyélite, notamment ses conséquences, l’utilité de vacciner les enfants, le bien-fondé de la riposte, l’accueil à réserver aux agents vaccinateurs. De même, avec les spécialistes, nous avons œuvré à déconstruire les rumeurs relatives aux prétendus « effets secondaires désastreux » de la vaccination. Que ce soit pour des interviews, des éditions de journal parlé ou les émissions, les personnes ressources ont beaucoup insisté sur cet aspect, en invitant les parents à se rapprocher des centres de santé en cas d’effets secondaires. Ils ont également beaucoup insisté sur la gratuité de la prise en charge.
Une autre stratégie a été les messages des leaders et des femmes. Nous avons interviewé des chefs de village, un Chef d’arrondissement et une responsable de groupement de femmes qui ont souligné, à travers des témoignages, l’importance de faire vacciner les enfants. Le but de cette approche est un peu plus psychologique. Les microprogrammes sont conçus en conséquence, les émissions orientées à dessein.
Avez-vous eu connaissance de cas de refus de faire vacciner les enfants ? Si oui, comment « Tchaourou FM » a contribué à convaincre les parents ?
Au cours de nos productions, en faisant un petit récapitulatif du 1er tour, nos personnes ressources ont évoqué les cas de résistance. Il s’agit notamment de certains groupes ethniques qui, pour des raisons culturelles, et d’autres pour des raisons religieuses, refusent aux agents vaccinateurs d’administrer la dose de vaccin à leurs enfants. Mais l’argument avancé principalement est relatif aux effets secondaires. Nous avons alors orienté notre communication dans le sens de déconstruire les rumeurs et surtout insisté sur la gratuité de la prise en charge dans les centres de santé en cas d’apparition d’effets secondaires, outre bien sûr tous les autres aspects.
Vos équipes de reportages sont-elles tombées sur des histoires que vous voudriez bien partager avec nous ?
Juste une petite anecdote sur un lieu de reportage. C’était à Tchatchou le 5 juin. Au cours d’une séance d’échanges avec les leaders religieux et élus locaux, le médecin-chef, pour illustrer ses propos au sujet du recours au centre de santé, a déclaré qu’une femme avait amené au centre son enfant qui avait de la fièvre deux mois après la vaccination et elle insistait que ce sont les effets secondaires de la vaccination. Toute l’assistance a éclaté de rire parce que tous étaient d’accord que deux mois c’était déjà trop pour attribuer une fièvre aux effets secondaires de la vaccination.
Quel appel avez-vous à lancer à l’endroit de la population au sujet de la vaccination des enfants en général et celle contre la poliomyélite en particulier ?
Aucune vaccination pour enfant n’est à banaliser. La vaccination contre la poliomyélite est encore plus importante. Malheureusement nos parents surtout en milieu rural ne le comprennent pas. Cela peut s’expliquer par l’ignorance, la méconnaissance ou carrément la négligence, ce qui n’est pas sans conséquence sur le taux de décès néo-natal. En conséquence je voudrais demander aux populations en général et aux mères d’enfants en particulier de ne point négliger la question de la vaccination. J’ai foi que les agents de santé effectuent le travail de sensibilisation nécessaire depuis les consultations prénatales jusqu’à l’accouchement. J’invite donc nos mamans à suivre les conseils des agents de santé et respecter rigoureusement le calendrier vaccinal qui leur est indiqué. Il en va de la santé de leurs enfants.
Dans tous les cas, nous, à la radio communautaire Tchaourou FM, média de proximité par excellence, n’allons pas manquer de jouer notre rôle à travers nos productions pour informer, éduquer et sensibiliser sur les thématiques en lien avec la santé infantile en général et les questions de vaccinations en particulier. Nous sommes rassurés que nos productions portent leurs fruits puisque les agents de santé ont avoué que c’est entre autres « grâce à Tchaourou FM » qu’ils ont réalisé le taux de 102% au 1er tour.