Maboudou Abdou Rahim alias » Bravo », est un jeune écrivain, poète et artiste slameur béninois. Il a commencé ses premiers pas dans le monde de la littérature lorsqu’il était en classe de Cours Moyen Première année (Cm1), en 2005. Aujourd’hui, Bravo a, à son actif, le livre de la jeunesse béninoise dénommé « Le chant des vers » sorti le 15 mai 2019. Bravo fait partie des jeunes écrivains qui veulent apporter leur grain de sel pour l’évolution de la littérature. Au détour d’un entretien exclusif accordé à la rédaction du quotidien Daabaaru, le jeune écrivain béninois est revenu sur son parcours poétique et artistique. Il n’a pas manqué de lancer un Sos aux autorités en charge de la culture pour la promotion de ce secteur en général, et des jeunes en particulier. Lisez plutôt.
Wilfried AGNINNIN
Daabaaru : Qui est Bravo? :
Bravo : Bravo est titulaire d’une licence en anglais, option études africaines obtenue en 2017 à l’Université d’Abomey-Calavi. Il évolue depuis 2010 dans les Ong de la place comme chargé de communication et passionné des thématiques jeunes (santé de reproduction des adolescents et jeunes, éducation civique et citoyenneté). Féru des belles lettres, il gribouille à ses heures perdues ça et là, des textes tantôt poétiques, tantôt philosophiques. Il est l’auteur de « Le chant des vers », un recueil de poèmes abordant le mariage des enfants, l’incivisme des jeunes en circulation, la dépigmentation, la corruption, l’immigration, la xénophobie, etc… Bravo, au-delà de l’écriture, adore les voyages, la photographie et tout ce qui est ou se rapporte à l’art, la créativité, la culture.
Pourquoi Bravo comme nom d’artiste?
C’est un surnom tiré du » Manuscrit Chancelor » un polar écrit par le célèbre Robert Ludlum où un groupe (Inverbrass) d’agents secrets sont engagés pour mettre la main sur l’assassin du directeur du Fbi Edgard Hoover. Bravo est l’un de ces agents. Je dois ce surnom à Eudorès Rodolphe Cakpo alias Génèse (hommage vivant et vibrant), grâce à qui j’ai découvert ce roman et par ricochet, le fameux agent secret Bravo. Donc, en clair, depuis 2008, classe de 4e je portais déjà ce surnom. Il s’est imposé à moi avec le temps comme une quête perpétuelle de l’excellence, de la perfection et des ovations. Bravo sort d’un livre pour prendre corps et sortir un livre.
Pourquoi avoir choisi faire carrière dans l’écriture et la musique ?
Est-ce que j’ai vraiment choisi ? Je ne pense pas. Déjà à 13 ans, classe de Cm1, donc en 2005 j’écrivais, raturais des bouts de poèmes à Fatimata Diallo, à qui je rends un vibrant hommage au passage. Sa beauté a su, souffrez que je sois vrai et véridique, allumer et attiser en moi le souffle poétique. Plus tard, en classe de 1ère, 2011, mon professeur de français Azélokonon Ulrich me fera découvrir les poètes maudits, plus précisément le génie précoce d’Arthur Rimbaud et le génie poétique de Charles Baudelaire. Peu à peu, j’ai commencé par écrire. Déjà j’étais un fou de la lecture. J’ai écrit beaucoup de textes qu’en 2012 je présenterai à M. Charlemagne Quenum, professeur certifié de français de mon collège. « Ce que tu écris n’est pas de la poésie. Tu bavardes dans tes écrits. Va lire Senghor, Césaire, Baudelaire, Hugo et autres… » m’avait-il lancé au visage . J’ai reçu le choc avec toute la douleur qui va avec. J’ai pleuré mais après je me suis réellement mis au travail et à l’étude de la poésie classique puis de celle moderne. Longtemps pendant longtemps, j’ai voulu écrire ou publier certains textes sur les réseaux spéciaux mais à chaque fois je me rappelais des mots de M.Quenum et je me disais que je n’étais pas encore prêt. Finalement le 28 janvier 2017, j’ai brisé le silence en publiant sur la toile un poème qui sera aimé de beaucoup de gens. Depuis lors, j’écris avec la ferme conviction que la poésie est d’abord émotion avant d’être image et que si l’on a un rêve, il faut se battre pour le réaliser. « A cœur vaillant, rien d’impossible » disait Pierre Corneille. J’ai écrit au fil du temps jusqu’à sortir le 15 mai 2019, en dépit des soubresauts, le livre de la jeunesse béninoise: Le chant des vers.
Quant à la musique, est-ce que j’en fais d’abord. Peut-être que j’écris de la musique mais je n’en fais pas encore. Le Slam est la poésie dite, la poésie orale où le rythme et la musicalité s’unissent pour la plus belle des chorégraphies. C’est grâce à Christelle Agbo que j’ai commencé par dire, réciter mes textes sur scène. C’est ma coache. Si je suis là où je suis aujourd’hui, c’est en partie grâce à elle.
Une brève sur votre première apparition sur scène
Ma première fois sur scène? C’était dans l’une des salles de la zone master de la Fsa de l’Université d’Abomey-Calavi. J’ai déclamé le texte » Ah Fric ou l’art-fric de l’Afrique » qu’on retrouve à la page 48 du chant des vers. Cette première sur scène était applaudie de toute la salle. Je me souviens qu’un ami m’a même offert un billet de 500fr alors que je prestais. J’ai aimé le fait que l’assistance ait aimé. Je venais d’avoir l’assurance que je suis sur la bonne voie. J’y suis toujours je crois.
Sur les pas de quel écrivain et slameur? marchez-vous?
Ecrivain, je suis plus sur les pas des poètes maudits que j’ai très tôt découvert et depuis lors, aimé. Toujours est-il qu’on ne peut pas ne pas lire, aimer et suivre ceux de chez nous : Césaire, Birago Diop, Habib Dakpogan, Méchac Adjaho etc…Côté slam, je voudrais bien dire Grand corps malade mais hélas. Je suis plus Souleymane Diamanka, Capitaine Alexandre et Djamile Mama Gao (mon mentor d’ailleurs). Djamile, m’oriente, me conseille et me guide.
Cette passion vous nourrit-elle?
Pas encore. Mais je garde espoir qu’avec le formidable travail que votre organe fait dans la valorisation et la promotion des jeunes talents, le slam en tant que art de l’oralité, finira par être connu, bien vendu et bien consommé. C’est ainsi que cela me nourrira. C’est ainsi aussi que le livre nourrira l’écrivain. Au passage, le livre est disponible à 3000fr. Prière contacter le 96 84 13 05 pour vous le procurer.
Quels sont vos projets à court, moyen et à long terme?
Plein plein de projets. Je vous réserve la surprise.
Un mot sur la récente sortie de votre recueil
Ce n’était pas une sortie de livre. C’était une tournée de présentation. Car le livre est sorti comme dit plus haut, en mai 2019 et le lancement a été fait le 29 juin de cette même année. A l’occasion de la journée internationale de la poésie célébrée chaque 21 mars, j’ai pensé à présenter le livre dans les bibliothèques des Centres d’Activités Educatives du Bénin ( Caeb). C’est ainsi que le 20 mars j’étais au Caeb Parakou, le 27 au Caeb Natitingou le matin et l’après-midi dans celui de Djougou avant de revenir sur Parakou en soirée.
Un mot sur l’environnement littéraire et musical béninois
Je me prononcerai sur l’environnement littéraire. Nous n’avons pas au Bénin, une industrie du livre. Aucune politique du livre. Les talents ne sont pas que les vieux. Au sein des jeunes, il y a une kyrielle de talents qui n’attendent qu’on leur tende la main. Le talent n’a pas d’âge. Il faut que le ministère de tutelle pense à comment réellement impliquer les jeunes écrivains comme nous dans les instances de prises de décision. Ce n’est pas tous les jeunes qui vont à l’art parce qu’ils sont au chômage. Il y en a qui y vont au nom de la passion et parce qu’ils restent convaincus que grâce à la littérature on peut remodeler les mentalités et forger de nouveaux types de citoyen pour un réel développement du pays. A l’endroit des aînés, nous ne venons pas pour prendre votre place. Rassurez-vous ! Nous venons, nous écrivons aussi parce que nous pensons avoir le droit de placer un mot, de dire notre mot. Nous ne vous demandons pas de nous prendre en inimitié. Juste de jouer votre rôle d’aîné, de devancier, de mentor peut-être. Quant à mes collègues jeunes écrivains ou slameurs, écrivons bien, écrivons beau et bon. Faisons bien ce que nous aimons et savons faire. Que l’environnement littéraire ne soit plus malade de nos maux.
Votre mot de la fin
De très belles âmes me soutiennent jusqu’aujourd’hui, beaucoup croient en moi, merci à tous ceux-là. Quand on vient de loin, on ne peut pas s’arrêter en si bon chemin. On ira le plus loin possible encore. Au nom de la littérature ! Au nom de nos rêves ! C’est le lieu de remercier tous ceux qui ont contribué à la réalisation de ce livre, tous ceux qui me connaissent. Merci à nous ! Merci et félicitation au quotidien Daabaaru pour ses nobles efforts. Merci infiniment
Dieu bénisse l’œuvre de nos mains.
Bravo !!!
Propos recueillis : Wahabou ISSIFOU