Les affrontements entre agriculteurs et éleveurs au Bénin persistent. Le phénomène est loin d’être conjugué au passé. Difficile de passer un mois sans que l’on ne parle de ce phénomène dans une localité du Bénin. Le dernier cas remonte seulement au jeudi 5 mai 2022 où quatre morts ont été enregistrés dans un affrontement sanglant entre éleveurs et agriculteurs. Les faits se sont produits à Kpaari, dans l’arrondissement de Kika, commune de Tchaourou. Face à cette pratique très récurrente, le gouvernement et les acteurs du monde pastoral sont invités à réfléchir davantage afin de trouver des pistes de solutions durables pour prévenir ce phénomène qui subsiste.
Wilfried AGNINNIN
La paix entre agriculteurs et éleveurs au Bénin n’est pas pour aujourd’hui. C’est une éternelle guerre entre la langue et les dents. Elle est même plus vieille que la première guerre mondiale. Pour dire que c’est un vieux démon que les gouvernants qui se sont succédé au sommet de l’État n’ont pu jusque-là chasser. Les efforts des autorités et ceux des acteurs du pastoralisme n’ont pratiquement rien changé sur le terrain.
Un coup d’épée dans l’eau pour le gouvernement de la rupture ?
Depuis l’avènement du gouvernement du président Patrice Talon en avril 2016, des actions ont été menées pour régler les conflits entre agriculteurs et éleveurs au Bénin. Ainsi, il a été crée le mercredi 16 juin 2021, en conseil des ministres le Haut commissariat à la sédentarisation des éleveurs dirigé par le Dr Adamou Maman Sambo. Selon le gouvernement, cette décision a été prise parce que « l’élevage des ruminants au Bénin est basé sur l’exploitation du parcours naturel. De ce fait, il est peu productif et occasionne des dégâts sur les cultures autant qu’il est source de conflits divers entre agriculteurs et éleveurs. C’est pour mettre fin à cette situation et accélérer la modernisation de l’élevage que le conseil des ministres a approuvé la mise en place d’un Haut commissariat placé sous l’autorité directe du Président de la République du Bénin ».
Dans la même dynamique, le gouvernement beniniois a lancé le 23 décembre 2021, à la maison des Jeunes de Gogounou, le Projet de Sédentarisation des troupeaux de Ruminants au Bénin (Proser). Il a pour but de réduire les effets pervers de la transhumance et d’améliorer la contribution du sous-secteur de l’élevage à la croissance économique. À toutes ces actions, l’on peut citer également la création des couloirs de passage pour les éleveurs dans les communes, des séances de sensibilisations entre agriculteurs et éleveurs ainsi que des ateliers de formation. Mais toutes ces actions semblent être un coup d’épée dans l’eau. Car, malgré tout, les conflits deviennent de plus en plus récurrents dans les localités du Bénin surtout dans la partie septentrionale.
Les causes
« Chassez le naturel, il revient au galop ». La communauté peulh tient beaucoup à sa culture. Il sera donc difficile, voire impossible, de réussir à sédentariser cette communauté nomade depuis la nuit des temps. De même, l’éleveur tient et considère plus son bœuf au détriment de la culture du paysan. Ce qui occasionne des conflits. Sous l’effet de la colère, certains agriculteurs vont même jusqu’à empoisonner les animaux des éleveurs. Il faut aussi souligner que certains pasteurs peulh confient leurs troupeaux de bœufs aux enfants. Ces derniers ne pouvant pas bien cadrer les bêtes, ils se retrouvent dans les plantations. Autant de raisons, que l’on peut évoquer liées aux conflits entre agriculteurs et éleveurs.
Au regard de l’ampleur de ces sanglants affrontements, les autorités surtout celles à la base doivent intensifier la sensibilisation des agriculteurs et éleveurs afin d’amener chaque partie à la raison et situer les responsabilités. En attendant, l’on se demande à quand la paix entre agriculteurs et éleveurs au Bénin.