La campagne de ramassage de noix de cajou bat actuellement son plein. Les agricultures et propriétaires de champs d’anacarde sollicitent les jeunes de tous âges pour le travail à temps partiel. Entre volonté et insatisfaction, ces jeunes s’adonnent à ce gagne-pain pour joindre les deux bouts.
Jean-Baptiste FAMONMI (Stg)
Il est 9h à Tchatchou le mardi 20 février 2024. Des jeunes venus de Parakou s’affairent dans un champ d’anacardier. En mains, certains tiennent des sacs de 50 kg, d’autres de 100 kg raccommodés. «C’est la période de ramassage des noix de cajou. Je suis là pour le boulot», déclare ouvertement Nel Akibo, jeune diplômé dans une filière de transformation alimentaire au lycée technique d’Ina. De l’autre bord de ce même champ d’anacardier, d’autres jeunes têtes baissées, les yeux rivés au sol ne veulent laisser échapper aucune pomme de cajou. «C’est le travail qui demande cela. Nous sommes là deux à trois fois parfois par semaine», clame Alfred, un de ces jeunes, la vingtaine à peu près. A l’en croire, cet exercice auquel s’adonnent ces jeunes n’est que routine chaque année. De petites bassines en mains pour ceux d’entre eux qui n’ont pas fait le choix des sacs, ramassent périmètres par périmètres les pommes tombées. Un peu partout dans ce champ l’on peut voir des tas de pommes de cajous. «Dès qu’on finit de regrouper les pommes tombées, nous allons retirer les graines des pommes. Ce sont ces graines qu’on rassemble ensuite dans un grand sac», précise Nel Akibo.
Une activité sans complaisance aucune bien que peu lucrative
Faire cette activité chaque année se présente comme une opportunité pour certains jeunes de la ville de Parakou, que ce soit des élèves ou étudiants. L’une des raisons avancées par quelques-uns d’entre eux est la recherche d’un gagne-pain. «Le petit déjeuner que me donnent les parents ne suffit pas, j’ai d’autres besoins et je n’attendrai pas toujours les parents pour les satisfaire», avoue ouvertement Pierre, vêtu d’un pantalon en pagne de couleur jaune mêlée au rouge et d’un tee-shirt décoloré. D’autres jeunes, histoire de s’occuper mettent à profit les congés de détente pour faire le job. Étant aux aguets, nombreux d’entre eux sont prêts à sauter sur l’opportunité ou d’autres similaires quel que soit le lieu. «Nous n’avons pas le choix. A l’heure là, on est chaud pour bosser partout. Il arrive des fois qu’on aille à Tchaourou pour travailler», a fait savoir Alfred Mouléro. Mais la satisfaction n’est pas totalement à son comble chez ces jeunes ‘’jobistes’’ au moment de la récompense compte tenu des efforts fournis proportionnellement au travail abattu. «Nous ne sommes pas payés en espèce après le ramassage», martèle Alfred, l’air insatisfait. Une fois le ramassage de l’anacarde effectué, suivi de l’extraction de la noix de cajou, ces jeunes reçoivent collectivement leurs dus. «Nous prenons les 1/5 des noix de cajou comme récompenses de notre travail de la journée», poursuit-il. À l’en croire, les profits générés par cette activité ne sont pas assez concluants pour eux. «Si en équipe, nous ramassons 30 kg de noix de cajou par exemple, nous en repartons avec au moins 6kg. Parfois plus si le propriétaire du champ est généreux», explique-t-il. Pour une meilleure entente au sein de l’équipe, cette récompense est soit vendue, soit partagée. Pour eux, la meilleure option est la première car, répondre à ses petits besoins paraît bien plus nécessaire. «Nous vendons la récompense et nous partageons l’argent», dit Épiphane Worou, avant d’ajouter, «avec l’argent, j’achète des habits». Selon Alfred Mouléro, «j’habite seul et vis à mes dépens. Avec l’argent gagné, j’achète des provisions à la maison pour être pendant un moment à l’abri du besoin», confie-t-il.
