PROLIFERATION DES CHAMBRES DE PASSAGE A PARAKOU : Le difficile choix entre la rentabilité économique et le laisser-aller

5 ans ago | Written by
29 625 vues
0 0

PROLIFERATION DES CHAMBRES DE PASSAGE A PARAKOU

Le difficile choix entre la rentabilité économique et le laisser-aller

Les établissements d’hébergement, encore appelés chambres de passage (Cp) ou ‘’labo’’ vont de plus en plus grandissants sur toute l’étendue du territoire national. Parakou, troisième ville à statut particulier du Bénin n’échappe pas à cette réalité. Ainsi, des chambres de passage poussent dans la cité des Koburu comme des champignons. Même si ces établissements constituent de véritables sources de revenus pour les promoteurs, la mairie et l’Etat, ils se présentent au même moment comme des lieux de graves déviances insoupçonnées. Face à ces deux réalités, l’une à l’antipode de l’autre, plusieurs acteurs se voient interpellés.

Wahabou ISSIFOU

Communément appelées Cp, les chambres des auberges se sont multipliées en un temps record dans la ville de Parakou. Elles poussent comme des champignons dans les coins de rue et même dans des endroits insoupçonnés. Chaque quartier a en son sein un ou deux auberges devenues de véritables laboratoires. Sur toute l’étendue de la commune de Parakou l’on peut compter plus d’une centaine d’auberges, que ce soit dans le centre que dans les zones périurbaines. Mais que comprendre des établissements d’hébergement touristique ?

Une chambre de passage

L’établissement d’hébergement en question

L’arrêté n° 303/Mcaat/Dc/Sgm/Ctj/Ctth/Dpet/Sa fixant les normes de classement et de déclassement des établissements d’hébergement touristique en République du Bénin en son article 2 dispose : « sont réputés établissements d’hébergement touristique, tous les établissements commerciaux offrant des chambres ou des appartements équipés et meublés en location, soit à une clientèle de passage à la journée ou à une clientèle qui effectue un séjour caractérisé par une location à la semaine, au mois, mais qui n’y élit pas domicile…. » Les différents types d’établissements d’hébergement touristiques selon l’article 2 de cet arrêté sont les hôtels, les auberges, les motels, les villages de vacances, les pensions, les relais, les gites et biens d’autres. Au nombre de ces établissements d’hébergement touristique figurent les chambres de passage qui sont installées dans tous les coins de rue et même dans des endroits insoupçonnés grâce à la recherche du gain.

Un commerce assez rentable

Au départ les auberges étaient créées pour rendre encore plus attirant le développement touristique dans les villes. Mais à par ce rôle plusieurs d’autres activités se déroulent dans ces lieux. Faire un tour avec sa copine pour le plaisir sexuel. Et ce sont les promoteurs qui en trouvent plus leur compte.
Une activité qu’ils ont découverte il y a environ cinq années grâce à l’évolution démographique. Et ils s’en réjouissent énormément car l’activité est rentable et ces promoteurs en profitent. Daniel O., promoteur d’auberge dans le quartier Albarika au premier arrondissement témoigne. « Moi, j’ai compris très tôt. Il y a dix ans Parakou n’était pas comme cela. Mais je savais que dans peu de temps la ville va beaucoup évoluer. Et voilà aujourd’hui », a-t-il confié tout en rappelant la concurrence qui commence pas naitre ; « cette activité m’a permis d’acheter plusieurs parcelles et de quitter la location. Mais comme beaucoup ont vu ça, ils ont commencé aussi par créer ». Dame Martine, promotrice d’auberge au quartier Titirou ne dira pas le contraire. « C’est quand j’ai constaté que le besoin d’hébergement à Parakou a commencé par augmenter, c’est-à-dire les gens commencent par venir travailler pour quelques jours, et repartir. Parce que mon époux est à Cotonou, et à chaque fois ses amis veulent faire quelques choses à Parakou, c’est chez nous on les héberge. C’est là que j’ai compris, car cette situation se passe chez beaucoup de personnes », s’est-elle justifié en reconnaissant qu’elle avait raison. Mais il faut reconnaitre qu’au-delà de passer des nuits, d’autres personnes décident de passer juste une, deux, ou trois heures pour assouvir leur besoin sexuel. « C’est après que les gens demandent à passer quelques heures avec leur copine quand ils ne veulent pas passer la nuit. Et ça marche », a ajouté dame Martine en admettant qu’elle ne se plaint pas du tout. Cependant, mise à part le développement économique personnel des promoteurs, ils participent également au développement de la cité. Mais des questions se posent sur l’hygiène et l’assainissement de ces lieux.

Des problèmes de santé ?

Oui. C’est lieux peuvent et sont d’ailleurs par endroit dangereux pour ceux qui s’y rendent pour leur plaisir. L’hygiène n’est pas totalement à portée de main. Que ce soit le cadre de vie, les lits ou les douches. Des questions se posent sur comment les gérants se débrouillent pour rendre l’environnement vivable aux visiteurs. Des draps qui se changent à peine quand on sait qu’après un rapport sexuel non protégé des liquides biologiques peuvent se déposer sur ces supports de couchage. Selon le docteur Isaac Houngnigbè, médecin généraliste, « si les chambres de passage servent comme lieu pour des rapports sexuels, l’augmentation de leur nombre, en l’absence de mesures de prévention, pourrait faire craindre une hausse de fréquence des Maladies Sexuellement Transmissibles (Mst) dont le Vih-Sida, qui reste un enjeu de santé publique dans notre pays. ». Les risques pour la santé peuvent être de plusieurs ordres selon lui, « les maladies liées à l’hygiène et à l’assainissement. En l’absence de renouvellement ou de lavage correct des draps, les risques de maladies comme l’Hépatite B, les infections de la peau. En l’absence de toilettes propres, d’eau potable et de savon pour le lavage des mains, des maladies diarrhéiques peuvent survenir. »

Quid de la sécurité

Le commissaire central de la ville de Parakou Barnabé Amangbégnon a fait de pertinentes observations sur la question de sécurité relative à ce sujet. Pour le commissaire de police, les gérants ou les promoteurs viennent régulièrement faire enregistrer les clients qui veulent passer des nuits. Bernard K. gérant d’une auberge au quartier Wansirou confirme les propos de l’agent de sécurité publique. « Quand un client dit qu’il veut passer la nuit ou des jours, nous prenons sa carte d’identité pour remplir le registre que nous amenons au commissariat pour la déclaration », a-t-il indiqué. Pour le commissaire de Police, cette disposition établie dans les textes permet de prendre des mesures de sécurité au cas où ces personnes étaient recherchées ou ont commis un acte et veulent se réfugier à cet endroit. « Mais pour ce qui concerne les clients qui passent une ou deux heures, aucune disposition n’est prise à ce niveau. », a-t-il ajouté. Mais il faut reconnaitre qu’il y a de ces gérants qui outrepassent ces dispositions en complicité avec les clients qui n’est qu’à la recherche du bénéfice. « Si le client dit qu’il veut passer une semaine et que sa carte est perdue. Moi je regarde l’argent que je devrais gagner, et je le laisse. Tous les clients n’ont pas leur carte sur eux et nous nous sommes des commerciaux. Si je refuse, il ira ailleurs. Et en parcourant toute la ville, forcément un autre gérant va prendre, 5000 fois 7 jours, c’est de l’argent que je perds comme ça », a confié Donald G., un gérant. Ce sont là des situations qui surviennent presque tous les jours à l’insu des forces de l’ordre. Ceci démontre clairement que les populations ne sont pas toujours en sécurité lorsqu’on sait que quelqu’un peut aller commettre un forfait ailleurs et venir se cacher dans ces lieux.

Des laboratoires sexuels à la portée des enfants

Les chambres de passage sont beaucoup fréquentées à Parakou. Loin de cette idée de penser que ce sont des touristes, des étrangers en passage dans la ville qui résident dans ces lieux, les Cp pour plusieurs sont des endroits pour satisfaire sa libido. « Il arrive de ces fois où après un moment de rafraichissement avec ton invitée, l’envie de faire l’amour vient, et il y a des buvettes qui ont des chambres. Voilà là un profit de se satisfaire », déclara Moussa Karim. Si pour certains, c’est juste pour des occasions et quand se présente l’envie, pour d’autres, ce sont des obligations qui s’imposent. Ainsi, Sika Alassane témoigne, « Moi je suis un homme marié. Et j’ai une maitresse. Pour respect à ma femme, je ne peux pas me permettre d’amener une maitresse à la maison pour me satisfaire ou non, ou juste passer du temps avec elle… ». On comprend alors, que c’est une nécessité. Mais lorsque cette envie pousse des hommes à vouloir passer à l’acte sexuel avec des mineures, il y a de quoi s’inquiéter lorsqu’on sait que commettre un acte sexuel avec une mineure est contre les mœurs. « Moi je ne sais rien des textes, lorsque la fille accepte et le gérant ne dit rien, je fais ma chose et ça passe. A dix-sept ans on peut accepter sans problème », a confié Pierre Y. surpris à l’entrée d’une chambre de passage dans la ville de Parakou. Même son de cloche chez Boniface H., « tant qu’il n’y a pas de dégât, pas de souci. Moi, je ne les appelle pas mineure, l’âge n’a pas d’importance, une fois qu’elle est en forme, c’est fini. Elle veut l’argent, je veux le truc et on s’entend ». La proximité de certains de ces établissements d’ébergement des écoles et des ateliers d’apprentissage pousse certainement bon nombre de mineurs à la découverte précoce de ce qui se passe dans le secret de ces lieux.

Urgente nécessité d’agir pour limiter les dégâts

La jeunesse n’est elle pas le fer de lance, dit-on ? Alors pourquoi au nom des intérêts égoïstes, les garants de la protection des enfants doivent rester muettes face à cette situation qui décime et déchire la société ?
Si la situation est devenue telle qu’elle aujourd’hui, c’est clair que les parents ont déjà perdu leur autorité. Les parents ont complètement fui leur responsabilité. Après eux, ce sont ces gérants qui ne disent mot lorsqu’un client vient avec une mineure au sein de son auberge pour prendre de l’alcool et après passer à l’acte sexuel. Même si certains gérants arrivent à faire attention à ces cas, c’est leur chiffre d’affaire qui prend un coup. Les promoteurs et les autorités sont ceux là qui doivent alors sévir. Mais malheureusement ils font la sourde oreille et le phénomène suit son cour. Le détournement de mineure est un acte punissable et les gouvernants depuis les élus locaux jusqu’au niveau étatique doivent vite réagir afin que cette bavure dont font montre certains hommes irresponsables à la quête d’un quelconque plaisir cesse à jamais.

Article Categories:
A la une · Actualité · Société

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Daabaaru