RÉSURGENCE DES COUPS D’ÉTAT EN AFRIQUE : Le sociologue Victor Dangnon expose les raisons plausibles

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Depuis 2020, plusieurs pays de la sous-région ouest-africaine ont été victimes d’un changement brutal de régime, passant de gouvernements civils à ceux militaires. Le dernier en date est le coup d’État intervenu le 26 juillet 2023 au Niger et qui a mis fin au régime du Président Bazoum. Si de nombreuses personnes et Chefs d’État pensent à prendre le taureau par les cornes et rétablir l’ordre constitutionnel, la démocratie, d’autres voix se penchent plus loin, aux racines du mal. Le sociologue de développement Michel Victor Dangnon, ancien parlementaire béninois a trouvé dans son analyse que les coups de force en Afrique reçoivent de plus en plus les bénédictions des populations. Les interférences occidentales semblent s’ériger en socle des sentiments de délivrance, de révoltes populaires, selon e sociologue. Voici l’intégralité de son analyse.

Florent YAMA

« J’ai hésité, pour convenances personnelles, d’opiner sur cette question qui n’a pas arrêté de faire couler encre et salive. J’ai hésité à exprimer publiquement mes sincérités, face à cette grosse actualité. Mais d’une telle actualité sociopolitique africaine qui s’impose aujourd’hui comme préoccupation élargie de l’heure, s’abstenir à y placer un mot peut être perçu comme un refus de contribution à la diversification des opinions, à suggérer sa modeste aide à la décision, à usage des pouvoirs publics d’ici et da là-bas.

Bref, la tourmente que traversent les États de l’Afrique de l’ouest francophone et l’Afrique centrale interpelle aussi bien les consciences africaines dans son ensemble que celles des colons d’hier. Nos États se doivent d’aller au-delà des émotions. Les dirigeants africains ne perdent rien en comprenant le diktat d’un avènement nouveau, une articulation incontournable de l’histoire des peuples. Ces dirigeants, à divers niveaux d’obédience, conservatistes en l’occurrence, doivent réaliser que nous sommes tous à l’orée d’une nouvelle moule faite de matériaux nouveaux beaucoup plus adaptés au contexte environnement, parce résilients et coordonnés. La nouvelle génération africaine, en effet, s’installe avec de nouvelles perceptions d’une justice égalitaire et de droit de propriété. Les outils dont est dotée aujourd’hui la génération nouvelle, permettent de perforer le mythe et de se constituer un idéal d’égalité et un fort désir d’autodétermination qui ne tient plus compte des calculs et des équilibres politiques de Paris. Se frayer un chemin dans le concert des Nations modernes et se débarrasser des traditionnelles interférences occidentales semble s’ériger en socle des sentiments de délivrance, de révoltes populaires. Les vagues massives de soutiens aux militaires dits putschistes est symptomatique d’un sentiment de malaise générationnel, de lassitude et de perte d’assurance face à des systèmes sociopolitiques pris au dépourvu de complicité jugée incestueuse et avilissante pour l’Afrique. L’échec des gouvernements démocratiques faîtes de la politique de copinage, de poids et mesures incohérents, constitue également le carburant essentiel d’un sentiment de rejet d’un vieux partenariat avec la France, ses alliés y compris. La plupart des États de l’espace s’y trouvent profondément imbibés, excepté quelques-uns où des efforts sont perceptibles. Et hormis quelques pays, le rêve de gouvernance démocratique a perdu de sa superbe dans l’espace francophone de l’Afrique, concomitamment avec tous les espoirs qu’il charriait à ses débuts : élections approximatives, mise sous scellé des libertés d’expression et autres droits primaires mis simplement sous boisseau, des promesses, in extenso, chaque fois renouvelées…

Comment, d’un terreau si fertile de frustrations quasi généralisées, manqueraient au rendez-vous des sentiments de désespoir ?

Les tentatives de prises de pouvoir à l’arrachée se font bienvenues !!! Les bruits de bottes, comme mode de succession au sommet des États, que la mémoire collective prenait pour révolus, reviennent, malheureusement, le vent en poupe. Ils ressurgissent en sauveur et en label du moment, même si, là aussi, les lendemains semblent incertains. Mais cette période de mutations et d’aventure à destination inconnue servira tout de même de temps de recueillement pour les dirigeants civils dont dont les responsabilités sont clairement établies.»

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