UNE VIE UN MÉTIER : Retour sur la carrière professionnelle de Thimothé Kpangon

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Votre journal Daabaaru est allé à la rencontre de Thimothé Luc Kpangon, pour le 4ème numéro de la rubrique une vie un métier. A cœur ouvert, l’homme qui a consacré 30 années de sa vie à transmettre le savoir en tant qu’enseignant, revient sur les temps forts qui ont marqué son séjour dans cette corporation. Suivez plutôt.

Daabaaru : Pourquoi avoir choisi faire carrière dans l’enseignement ?

Thimothé Luc Kpangon : J’ai intégré ce corps de métier en 1986 suite à ma réussite au premier concours organisé pour recruter des étudiants dans l’enseignement secondaire. Bien avant, j’étais étudiant en Chimie Biologie Géologie ( CBG) à l’Université d’Abomey Calavi.
Ayant une passion pour les Mathématiques et physiques, malgré mon Bac D et mon option pour la Cbg, il m’a plu de passer ce concours en choisissant d’enseigner les Maths- physiques dans les collèges. Il fallait rivaliser avec ceux qui avaient le Bac C et qui, pour la plupart étaient en filière Maths-Physique (Mp) au campus. Le gouvernement voulait sur le plan national, plus de 60 enseignants de Maths- biologies et 55 en Maths – physiques. Les résultats étaient tombés et j’étais le 55è ex. J’étais affecté le 3 janvier 1986 au Collège d’Enseignement Général (Ceg) Agamé, commune de Lokossa dans le département du Mono.

Comment étaient vos débuts dans cette fonction ?

Ma première expérience loin de mes parents a commencé. Ma chance est que dès l’annonce des résultats du concours, ma feue mère m’ordonna de prendre les rennes de la cuisine de toute la famille jusqu’à mon départ et me guidait chaque fois. Une fois à mon lieu de travail, mon premier choc était la rareté de l’eau à Agamé dans ce temps là. C’était un tracteur citerne qui chargeait de l’eau à l’usine Sonicog de koudo (village d’Agamé où est implantée l’usine), qui venait vendre l’eau aux propriétaires qui avaient creusé des citernes pour recueillir les eaux de pluie. Le seau d’eau était vendu à 100f et le salaire mensuel normalement 45.000 fcfa environ mais, on percevait une avance sur solde de 30.000f par mois. Tout calcul fait, j’ai préféré aller louer à Honton, un village de la commune de Dogbo où l’eau de puits est vendue à 25 f la bassine moyenne. Comme j’avais ma motobécane depuis le secondaire, le déplacement ne me créait aucun problème seulement qu’à la fin du mois, lorsque j’allais prendre mon salaire à Lokossa, je profitais pour me ravitailler en carburant du mois, car il n’y avait aucune autre possibilité dans le village. C’était dur pour le jeune citadin de Cotonou qu’on venait de sevrer.
Sans formation professionnelle (pédagogique) avant notre recrutement, mon premier cours de physique et chimie dans une classe de 5ème, prévu pour durer 1 heure de temps est terminé en 20 minutes. J’étais très étonné et étais obligé de chercher des astuces pour occuper le reste du temps. Avec mon humilité et en demandant conseils aux devanciers, j’ai commencé par me mettre aux pas.
Avec mes prières pour ne pas durer dans ce calvaire, je me suis adapté dans un laps de temps, surtout grâce à l’amour des habitants pour ma personne et de par mon humilité bien sûr. J’étais en plein dans ma profession quand, le concours de recrutement de la première promotion à former dans les Écoles Normales Intégrées (Eni) de Parakou, Lokossa et Natitingou, était lancé. Vu la chance que j’avais eue de justesse lors du concours précédent, cette fois-ci, j’ai choisi la filière Biologie-Géologie où, j’ai été le 7ème du Bénin sur les 30 reçus en 1987 et internés à l’Université de Parakou (Up) ex Unipar, le 7 décembre 1987. Nous étions ainsi les premiers étudiants de Parakou très aimés par les jeunes parakoises qui luttaient pour avoir un copain étudiant. Notre vie a automatiquement changé. Mon calvaire d’Agamé m’est devenu un lointain triste souvenir m’encourageant à aller plus loin dans les études pour ne servir que dans les grands centres. Après 3 années de formation, je fus muté au Ceg Albarika puis à Tchaourou où, j’étais toujours à cheval sur Parakou durant 15 ans de carrière. En 2002, j’ai été muté au Ceg les Pylônes à Cotonou et 3 ans après j’ai, été pour 2 ans de formation à l’Ecole Normale Supérieure (Ens) Félicien Nadjo de Porto-Novo pour devenir professeur certifié de Biologie. Devenu cadre A1, j’ai eu la chance d’être nommé Surveillant Général (Sg) d’abord, au Ceg Sainte Rita puis, au Ceg Dantokpa, ensuite censeur au Ceg Nokoué toujours dans Cotonou et enfin, Directeur au Ceg Attogon dans la commune d’Allada.

Quels sont les avantages de votre métier ?

L’Enseignement m’a tout donné, (femmes et enfants), que je supporte avec plaisir jusqu’aujourd’hui. Sur le plan matériel, j’ai vraiment réalisé dans ma vie, sans cité tout ce que j’ai pu accomplir. Grâce à ce métier, j’ai des relations dans presque tous les services à travers mes anciens élèves qui ne cessent de m’égayer de temps en temps. C’est une grande fierté de voir que les élèves que j’ai enseignés au cours de ma carrière, ont réussi et occupent de grands postes de responsabilité aujourd’hui. Vraiment mon métier m’a offert et continue de m’offrir tout le plaisir de ce monde.

Parlez-nous alors des difficultés ?

Je parlerai à ce niveau de mon adaptation au métier et au terrain lors de mon séjour à Agamé. Ensuite, ma formation professionnelle loin de la famille. Le plus dur, c’est aussi les nuits sans sommeil à préparer les cours et corriger les copies des apprenants. C’est sans oublier les caprices de certains élèves, parents et collègues difficiles à maîtriser.

Quel ont été les jours les plus heureux de votre carrière ?

Moments heureux, c’est mes réussites aux concours, la fin de mes soutenances, de rapports de stages et mémoires, le jour où j’allais à la retraite, où on faisait référence à un passage biblique, « beaucoup d’appeler mais peu d’élus ». C’était vraiment une grâce.

Racontez-nous le moment qui vous a marqué négativement au cours de votre carrière ?

Le 8 juin 1986, 6 mois après ma première prise de service, ma feue femme Mathilde à cause de qui j’ai passé le concours pour devenir enseignant, a rendu l’âme sur la table de maternité au Centre National Hospitalier Universitaire (Cnhu) de Cotonou, avec le bébé. Ça a été un vrai choc pour moi.

Quels conseils avez-vous à prodiguer à la jeunesse d’aujourd’hui ?

Le travail, quel qu’il soit et bien fait, fait toujours le bonheur de l’homme et assure effectivement son indépendance. Je demande aux jeunes, d’éviter les ambitions démesurées. Il faut toujours agir selon ses moyens et ses possibilités. Éviter de courir pour l’achat d’une voiture comme priorité. Une fois recruté à un poste, il faut respecter ses chefs et avoir de considération même à ses subalternes.

Je vais ajouter que, la retraite se prépare dès la première année de fonction où, on a moins de charge. A 15 ans d’activités, il faut se fixer sa ville où village de retraite et commencer par concentrer ses efforts financiers là : achat de parcelles ou domaine, commencer par faire de briques et à 20 ans au plus, avoir un petit chez, et l’agrandir avec le temps

Votre mot de la fin ?

Je suis très heureux de cette opportunité que vous m’offrez ce jour. Je remercie Dieu le Tout Puissant de m’avoir laissé en vie et très actif afin de me rendre utile pour les jeunes qui tireront un plus dans mon message. Je vous remercie, vous et toute l’équipe du quotidien Daabaaru.

 

Propos recueillis et transcrits par Samira ZAKARI

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Expérience d'une vie

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